Ce carton illustre la lancette de gauche pour la verrière du Jugement dernier. Dans la partie supérieure, trois anges debout sonnent la trompette. Deux sont tournés vers la gauche alors que le troisième à gauche s’adresse à trois âmes situées en dessous. Un homme, les mains jointes, et une femme, sa main posée en visière sur son front, les regarde. Devant eux, un jeune enfant de profil est tourné vers la gauche, les bras écartés devant lui.

Pli, taches, petite déchirure en bas à droite, trous de punaises

Ce carton en couleur est le dessin précis à l’échelle 1:1 de la lancette gauche de la fenêtre de la façade occidentale du temple de Coppet illustrant le Jugement dernier. Deux autres cartons, les KF_1228 et KF_1230, complètent le projet pour ce vitrail. Comme l’indique la signature de ce carton, le vitrail date de 1955.
Dans le fonds Charles Clément donné au Vitromusée Romont en 1995, plusieurs esquisses, dessins et maquettes sont consacrés aux vitraux du temple de Coppet. Quatre sont dédiés à cette fenêtre et datent de 1953 (CHC_047, CHC_048, CHC_049 recto et verso). Il est très instructif de les étudier afin de voir comment le projet a évolué. Sur une première esquisse, la CHC_047, indiquée comme une “première idée” par l’artiste sur le dessin, celui-ci a disposé le Christ juge au centre du vitrail, debout, des rayons lumineux émanant de sa tête et s’étendant sur la partie supérieure du vitrail. En dessous, l’archange Michel, debout, tient de sa main droite une épée flamboyante baissée. Sur la lancette de gauche, trois âmes vêtues de blanc et de profil, se dirigent vers la gauche. Au-dessus, trois anges sonneurs de trompette sont esquissés. Il semble que l’artiste ait trouvé leur position quasi définitive. Sur le deuxième dessin, le CHC_048, Clément reprend l’ensemble des motifs de sa première esquisse et les affine. Un seul changement apparaît dans la position du visage d’une des âmes sauvées. Au lieu de regarder devant elle, elle tourne son visage vers le spectateur. Sur l’oeuvre CHC_049, seules sont illustrées les deux parties inférieures du vitrail. Le Christ est cette fois assis sur un trône entouré seulement de deux anges sonneurs de trompette. Au-dessous, l’archange Michel, debout, tient dans sa main droite une épée flamboyante. Les trois âmes envoyées au Paradis partent vers la gauche en levant leur tête vers l’ange alors que les âmes expédiées au purgatoire sont saisies par plusieurs diables qui les tirent vers les flammes.
Charles Clément réalise les vitraux pour le temple de Coppet en deux phases. Il est appelé une première fois pour les vitraux du choeur (Crucifixion et les deux verrières d’évangélistes) entre 1933 et 1934, qu’il réalise en collaboration avec l’atelier fribourgeois Kirsch et Fleckner. Vingt ans plus tard, en 1953-1955, il réalise avec l’atelier Kirsch frères les vitraux pour la nef et la façade occidentale.
En 1933, il est de retour en Suisse depuis une année après cinq ans passés à Paris et Marseille et continue son activité liée au vitrail (Rouiller, 1989, p. 199-200) commencée dix ans auparavant avec des verrières pour le temple d'Arnex (1922) (Courthiau, 2011, p. 327). Alors qu’il débute son travail pour les verrières du temple de Coppet, il est en train de terminer celui pour la cathédrale de Lausanne. Il y a réalisé quinze vitraux entre 1930 et 1934. Il vient également de terminer la grande verrière du choeur pour l’église de la commune voisine de Coppet, Commugny (1933), et va s’occuper de la création des vitraux pour le temple de Cuarnens (1935) (Rouiller, 1989, p. 205).
Lorsqu’il commence la seconde phase de sa création à Coppet, Clément s’occupe en même temps de la réalisation de cinq vitraux pour l’église de Crêt-Bérard à Puidoux et de quatre verrières pour l’église réformée de Goumoens-la-Ville (1953). En juin 1954, le vitrail du Christ Roi pour l’église Saint-Luc à Lausanne est inauguré (Rouiller, 1989, p. 205).
Entre ces deux époques le style de Clément a évolué. Pour les trois verrières du choeur, l’artiste compose un dessin avec une multitude de pièces de verres très petites et modèle ses personnages dans un style cubiste. Vingt ans plus tard, il simplifie ses motifs, agrandit les verres et va à l’essentiel. Son travail sur la couleur semble suivre le même chemin. Alors qu’il juxtapose une multitude de couleurs dans ses premières verrières, parfois se contrastant fortement, il préfère l’harmonie des teintes dans cette seconde phase créative. La verrière du Jugement dernier en est un parfait exemple. Composée dans une déclinaison allant du lie de vin au mauve, l’impression générale est harmonieuse et paisible alors que le vitrail consacré à la Crucifixion dégage une impression d’hétérogénéité qui fait néanmoins toute la force de la verrière.