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GSL_169: Saint Antoine de Padoue, Piété, François d’Assise entendant la voix du crucifix de Saint-Damien
(VS_StMaurice_ChapelleFoyerFranciscain_GSL_169)

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Titre

Saint Antoine de Padoue, Piété, François d’Assise entendant la voix du crucifix de Saint-Damien

Type d'objet
Artiste
Atelier
Datation
1932 et 1940
Dimensions
156 x 59 cm

Iconographie

Description

Ce vitrail se compose de trois parties.
En haut, dans un médaillon, saint Antoine de Padoue, vêtu de la bure, tient un livre de sa main gauche et de l’autre un coeur. De chaque côté du médaillon apparaît une fleur en verre moulé-pressé (blanche à gauche, verte à droite), ainsi que des cabochons de différentes formes et couleurs. Un phylactère avec le nom du saint se déploie sous le médaillon.
Sur la partie médiane supérieure, le mot “Piété” en latin, entouré d’une volute, est écrit en lettres orange sur un fond composé de cabochons et de verres structurés aux couleurs variées.
Au centre, François d’Assise, nimbé et les bras écartés, est agenouillé devant un grand crucifix peint, disposé verticalement à l’intérieur de la chapelle Saint-Damien, dont les murs sont partiellement détruits. A l’arrière-plan, au travers du trou béant laissé dans la paroi, on aperçoit une maison avec plusieurs fenêtres à baies géminées.
En bas, l’emblème franciscain, les conformités (bras du Christ croisant celui de François d’Assise, tous deux portant les stigmates et surmontés d’une croix au-dessus), apparaît au milieu de nuées et d’étoiles.
Une fine bordure composée d’un double ruban en spirale encadre le vitrail, rehaussé de trois cabochons orange en bas et d’un au sommet au centre.

Code Iconclass
11H(ANTONY OF PADUA)9 · St Antoine de Padoue, moine franciscain; attributs possibles : âne, livre, crucifix, croix dont les branches se terminent par des fleurs, coeur enflammé, enfant Jésus (sur un livre), lis - portrait du saint
11H(FRANCIS)31 · dévotion personnelle de St François d'Assise - vocation, conversion du saint
57B21 · 'Pietas', Piété; 'Pietà' (Ripa)
Mot-clés Iconclass
Inscription

S. Antonius a. Padua (en haut)
Pietas (au centre)
VITRAUX EXECUTES EN 1932 / PAR ALEXANDRE CINGRIA / DANS LES ATELIERS / CHIARA A LAUSANNE

Signature

Aucune

Technique / Etat

Technique

Vitrail au plomb, grisaille, jaune d’argent, verre chenillé, verre américain, verre moulé-pressé, cabochons, verre plaqué gravé à l’acide

Historique de l'oeuvre

Recherche

Ce vitrail a été réalisé par l’artiste genevois Alexandre Cingria et l’atelier Chiara de Lausanne pour la nef de la chapelle de l'Hôtellerie franciscaine de Saint-Maurice.

La création des vitraux de la chapelle du Scolasticat (devenu Foyer franciscain en 1977 puis Hôtellerie franciscaine en 2013) s’est faite en deux étapes, la première en 1932 lors de la restauration de l’ancienne chapelle par le Romontois Fernand Dumas et la seconde en 1940, lors de la construction du nouveau sanctuaire, par le même architecte. Sa consécration et bénédiction ont lieu le 15 décembre 1940 sous la direction du père Gaspard, supérieur de la Province suisse des Capucins (Gaspard, 1940). Les archives du Scolasticat nous apprennent que l’architecte Albert Cingria, fils d’Alexandre, avait également été sollicité pour ce projet de construction ([Charrière], 1939). La décoration intérieure est l’oeuvre de l’artiste valaisan Paul Monnier, auteur de la peinture murale du choeur (Haegler, 1941).

Suite à la pose en 1931 des vitraux d’Antoine Bessac (atelier grenoblois) pour l’église des Capucins à Saint-Maurice, jouxtant les murs du Scolasticat, les étudiants souhaitent également pouvoir admirer des verrières dans la chapelle de leur séminaire (Charrière, 1932a), modeste lieu de culte rénové par Fernand Dumas entre 1929 et 1932 (Voirol, 1933, p. 74). A cette occasion, Frère Gabriel-Marie Charrière, Directeur du Scolasticat (Haegler, 1941), choisit de se tourner vers la modernité, en plébiscitant l’artiste genevois Alexandre Cingria pour la réalisation des vitraux, malgré les avis défavorables, voire négatifs énoncés parmi les Frères Mineurs Capucins, à l’instar du Père Ambroise, qui, dans un courrier adressé à frère Gabriel-Marie, s’inquiète du devenir des “âmes séraphiques de nos saints franciscains dans les mains immondes du caricaturiste genevois”. Il se demande en outre comment Frère Gabriel-Marie, “nourri dans le plus pur classique”, a pu se laisser “prendre à la poisse dégoûtante des modernes ?” (Ambroise, 1932). Ces quelques lignes, violentes et sans détour, apportent une nouvelle fois la preuve que Cingria avait non seulement des détracteurs féroces qui le percevaient avec beaucoup de dédain, mais aussi que, malgré plus de dix ans d’activité du Groupe de Saint-Luc en Suisse romande, l’art moderne proposé par cette Société artistique catholique, dont Cingria était une figure centrale, n’arrivait pas encore à être toléré par tout le monde, et ceci même dans les milieux ecclésiaux. Alors que les étudiants se montrent très contents des projets soumis par Cingria, les pères, eux, “ont crié au trop violent !” (Charrière, 1932e).

Ne souhaitant donner raison à ses opposants, Frère Gabriel-Marie donne des consignes extrêmement précises à Cingria tout au long du processus créatif. Il choisit avec minutie un programme iconographique franciscain d’une grande complexité, dont il définit chacune des scènes, les inscriptions, les emblèmes et les saints de l’Ordre à représenter dans les médaillons (Charrière, 1932e). Il transmet à l’artiste des ouvrages (Charrière, 1932b et 1932d), dans lesquels il lui signale où trouver la description des différents épisodes de la vie de saint François à illustrer. Il étudie ensuite rigoureusement les projets envoyés par Cingria et lui adresse une liste de correctifs à effectuer (couleurs, texte, dessin) en lui répétant “ses instantes recommandations”, dont la netteté du dessin, même dans les détails. Il lui demande de modérer sa fougue des rouges, pour ne point faire du violent et lui rappelle qu’il souhaite travailler tant pour sa propre sauvegarde que la sienne. Il ajoute qu’il “commence à entrevoir une porte ouverte pour lui chez eux” et que “ce sera fait s’il satisfaisait aux exigences ci-dessus” (Charrière, 1932c). A la lecture de ces mots, nous comprenons que Frère Gabriel-Marie jouait sa réputation autant que celle de Cingria, voire même d’avantage.

Le 17 février 1932, Cingria signe le contrat pour la réalisation des vitraux de la chapelle. Il y est stipulé qu’il les réalisera de concert avec la Maison Chiara de Lausanne et précisé que l’artiste s’“engage à exécuter ceux-ci fidèlement selon les projets présentés et agréés, ce qui est la condition d’acceptation de la part du client” (Cingria, 1932b). Il est payé en trois tranches : la première en février 1932 (Cingria, 1932a), la dernière quatre mois après la fin de son travail (Cingria, 1932b). Rien n’est laissé à la spontanéité et à la fougue naturelle de Cingria. Il est contraint à une rigueur absolue dans chacun de ses dessins et doit se tenir aux consignes données. Le 17 mars 1932, Cingia reçoit la dernière tranche finançant son travail, qui est donc terminé (Cingria, 1932c). Les cinq fenêtres à dix scènes sont réalisées dans un laps de temps extrêmement court, d’environ six semaines entre les premières esquisses et la pose des verrières. Pour leur financement, Frère Gabriel-Marie fait appel aux dons, car il ne veut pas que le Scolasticat y participe. Il s’adresse aux anciens Scolastiques non Capucins qui se sont montrés très généreux, contrairement aux anciens élèves devenus Capucins plus critiques envers le projet (Charrière, 1932f).

En 1940, l’artiste genevois revient à Saint-Maurice pour concevoir l’ensemble des vitraux de la nouvelle chapelle, dont les seize verrières de la nef. Il reprend ses créations de 1932, tout en les adaptant aux nouvelles fenêtres beaucoup plus petites. Chaque scène de la vie de François d’Assise et sa vertu font désormais l’objet d’un vitrail. Au sommet de chaque baie, Cingria réintègre le buste des saints de l’Ordre réalisés pour la première chapelle en 1932, tout en les inscrivant dans un nouveau cadre ornemental. Il compose sept nouveaux portraits pour compléter le cycle et ajoute deux épisodes supplémentaires de la vie de François d’Assise. Une nouvelle bordure encadre chacune des fenêtres, alors que les cartouches avec inscriptions, disposés à l’origine sous chacune des illustrations de la vie de François, sont abandonnés (probablement la mention des donateurs prévue par frère Gabriel-Marie en 1932) (Charrière, 1932d). Aucune source ne nous permet de savoir comment se sont déroulés ces remaniements. Nous ne savons pas si c’est frère Gabriel-Marie qui a mené le projet à bien jusqu’au bout, puisqu’il est remplacé par son successeur, Damien Mayoraz, durant l’année 1940 (“Mutations dans la Province suisse des Capucins”, 1939, p. 3), mais il est certain que s’il n’a pu le faire, il a transmis au nouveau directeur son souci de rigueur et de clarté, comme le prouve le cycle verrier.

L’artiste imagine en plus six nouvelles verrières décoratives consacrées au Cantique de Frère Soleil de François d’Assise pour compléter l’ensemble verrier de la nef et crée sept roses pour la coupole du choeur et trois petits vitraux pour les fenêtres situées au pied des escaliers menant à la tribune. L’atelier Chiara réalise l’ensemble des nouvelles verrières de Cingria et élabore encore des fenêtres ornementales (appelées “grisailles”) pour la sacristie et la cage d’escalier menant à la chapelle.

Le panneau central de cette fenêtre, illustrant l’épisode de François d’Assise entendant la voix du crucifix de Saint-Damien était, en 1932, associé à la scène de la Rupture entre François d’Assise et son père, Pierre Bernardone (GSL_167). Le vitrail d’origine présentait en son sommet un médaillon consacré à saint Bonaventure, remplacé en 1940 par saint Antoine de Padoue lors de la création de cette nouvelle verrière.

Le compte-rendu écrit dans le Nouvelliste en août 1932 sur la chapelle est élogieux à l’égard de Cingria : “Comme les fils de S. François avaient eu recours aux artistes “modernes” de leur époque, Giotto entre autres, pour décorer les églises du couvent d’Assise, [le Directeur] confia l’exécution des panneaux au maître du vitrail, Alexandre Cingria” (V., 1932). Alors qu'il était considéré au début du projet par certains Capucins comme un vil caricaturiste, le journaliste du Nouvelliste le présente comme une référence ! A ses yeux, Cingria a réussi au Scolasticat à dompter cette “fameuse” lisibilité, qui lui a si souvent fait défaut dans sa carrière de peintre-verrier. Frère Gabriel-Marie a été un précieux mais intraitable guide dans cette quête.

Datation
1932 et 1940
Période
1932 – 1940
Propriétaire

Province Suisse des Capucins, Couvent de St-Maurice

Bibliographie et sources

Bibliographie

Ambroise, P. (1932, 25 avril). [Lettre à Gabriel-Marie Charrière]. Archives du foyer franciscain de Saint-Maurice, Suisse.

Charrière, G.-M. (1932a, 15 janvier). [Lettre]. Archives du foyer franciscain de Saint-Maurice, Suisse.

Charrière, G.-M. (1932b, 28 janvier). [Lettre à Alexandre Cingria]. Archives du foyer franciscain de Saint-Maurice, Suisse.

Charrière, G.-M. (1932c, 17 février). [Lettre à Alexandre Cingria]. Archives du foyer franciscain de Saint-Maurice, Suisse.

Charrière, G.-M. (1932d, 18 février). [Lettre à Alexandre Cingria]. Archives du foyer franciscain de Saint-Maurice, Suisse.

Charrière, G.-M. (1932e, 26 février). [Lettre à Alexandre Cingria]. Archives du foyer franciscain de Saint-Maurice, Suisse.

Charrière, G.-M. (1932f, 26 avril). [Lettre à Frère Ambroise]. Archives du foyer franciscain de Saint-Maurice, Suisse.

Charrière, G.-M. (1932g, s. d.). [Lettre à Alexandre Cingria]. Archives du foyer franciscain de Saint-Maurice, Suisse.

[Charrière, G.-M.]. (1939, 27 février). [Lettre à Albert Cingria]. Archives du foyer franciscain de Saint-Maurice, Suisse.

Cingria, A. (1932a, 10 février). [Quittance]. Archives du foyer franciscain de Saint-Maurice, Suisse.

Cingria, A. (1932b, 17 février). Contrat pour vitraux. Archives du foyer franciscain de Saint-Maurice, Suisse.

Cingria, A. (1932c 17 mars). Quittance. Archives du foyer franciscain de Saint-Maurice, Suisse.

[Durrer, M.]. (2020). La chapelle du Foyer Franciscain. Devenir fils et fille de la fraternité et de la paix [flyer sur la chapelle]. Saint-Maurice, Suisse : Foyer franciscain.

Eder, T. et Gauster-Glaubauf, J. (2007). Le Cantique de frère Soleil (François d’Assise). Savoirs et clinique, (8), 117-126. https://www.cairn.info/revue-savoirs-et-cliniques-2007-1-page-117.htm#

Gaspard, P. (1940, 6 décembre). [Lettre à Damien Mayoraz]. Archives du foyer franciscain de Saint-Maurice, Suisse.

Haegler, C. (1941, 5 février). L’art religieux d’une chapelle franciscaine. Le Nouvelliste, 1.

V., E. (1932, 9 août). La Chapelle du Scolasticat des RR. PP. Capucins à Saint-Maurice. Le Nouvelliste, 1.

Mutations dans la Province suisse des Capucins. (1939, 1er septembre). Nouvelliste valaisan, 3. https://www.e-newspaperarchives.ch/?a=is&oid=NVE19390901-01&type=staticpdf&e=-------fr-20--1--img-txIN--------0-----

Viatte, N. (1941). Oeuvres du peintre Paul Monnier à St-Maurice. Échos de Saint-Maurice, (40), 64-68.

Voirol, E. (1933). Trois vitraux. Échos de Saint-Maurice, (32), 74-77.

Informations sur l'image

Nom de l'image
VS_StMaurice_ChapelleFoyerFranciscain_GSL_169
Crédits photographiques
© Province Suisse des Capucins, Couvent de St-Maurice (Photo : Bruno Fäh, TAU-AV Produktion)
Date de la photographie
2022
Propriétaire

Province Suisse des Capucins, Couvent de St-Maurice

Inventaire

Numéro de référence
GSL_169
Auteur·e et date de la notice
Valérie Sauterel 2024