Nom

Kirsch & Fleckner, Fribourg

Variantes du nom
A. Kirsch & Cie · A. Kirsch & Co · A. Kirsch and Cie · A. Kirsch and Co · A. Kirsch et Cie · A. Kirsch et Co · Herbert Fleckner, Fribourg · Kirsch & Cie · Kirsch & Co · Kirsch and Cie · Kirsch and Co · Kirsch et Cie · Kirsch et Co · Kirsch Frères S.A. · Kirsch frères, Fribourg
Dates d'activité
1894–1938
Auteur·e et date de la notice
Camille Noverraz 2015 ; 2023
Lieux avec objets
Informations sur l'atelier

En 1894, le peintre verrier Ludwig Greiner transmet son atelier situé sur le Boulevard de Pérolles à son jeune employé, l’allemand Vinzenz Kirsch (Heimbach  1872 – Fribourg 1938). Formé dans sa ville natale, à Heimbach, le peintre verrier a ensuite travaillé dans l’atelier d’Adolf Kreuzer (1843-1915) à Zurich, canton dominant la production de vitraux historicistes en Suisse avec Friedrich Berbig (1845-1923), Karl Wehrli (1843-1902) et les Röttinger (1848-1947). Vinzenz Kirsch s’associe avec son compatriote Karl Fleckner (1865 Lahr, Baden – Fribourg 1934), qui n’est pas verrier de formation, mais a fait un apprentissage dans une entreprise de carton. Il assure les fonctions administratives, tandis que Kirsch assume la part artistique. Les deux familles vivent ensemble dans la même maison à Villars-sur-Glâne, où se trouve également l’un des ateliers (Pasquier, 1995, p. 99-100). L’entreprise connaît très vite le succès, avec une médaille d’argent lors d’une exposition à Bordeaux en 1895 et une médaille de bronze en 1896 à l’exposition nationale de Genève. 
C’est en 1895 déjà que l’atelier obtient son plus important contrat : la réalisation des vitraux de la collégiale Saint-Nicolas de Fribourg, qui devient cathédrale en 1924. Contacté par le Comité du concours  pour y participer, l’atelier préfère décliner la proposition, mais offre ses services pour la réalisation du projet primé (Von Roda, 1995, p. 49). C’est ainsi que le 30 novembre 1895, l’atelier dirigé par un artisan-verrier de vingt-trois ans se voit confier l’ambitieuse tâche de réaliser les vitraux de l’artiste Polonais Józef Mehoffer (1869 Ropczyce, Pologne – 1946 Wadowice, Pologne), lui-même âgé de vingt-six ans. Cette collaboration, qui va s’étendre sur plus de quarante années, est à l’origine du succès et de la reconnaissance nationale et internationale de l’atelier. La verrière des martyrs obtient en 1900 une médaille d’or à l’Exposition Universelle de Paris et l’atelier demande à Mehoffer de dessiner son vitrail-enseigne intitulé „La jeunesse de l’art“, véritable carte de visite pour la maison fribourgeoise (Pasquier, 1995, p. 103-104). 
Les vitraux de Saint-Nicolas de Fribourg marquent un tournant dans l’art du vitrail à l’orée du XXe siècle. L’artiste renouvelle le vitrail religieux en faisant entrer dans ces verrières l’Art nouveau, les traditions nationales polonaises et une grande expressivité (Pasquier, 2000, p. 158-159). La collaboration exemplaire de l'artiste avec l'atelier marque également le début d'une implication plus grande des artistes dans le processus de réalisation d'un vitrail, qui se cristallise après la deuxième guerre mondiale (F. Hoffmann, communication personnelle, septembre 2016). 
Si la part de marché la plus importante de l’atelier concerne d’abord le vitrail armorié, en plus d’autres domaines variés (gravure sur verre blanc pour vestibules, lanternes, montres, glaces et miroirs, toitures en verre, verre antique et de cathédrale, diamants de verre) (Pasquier, 1995, p. 100), à la suite de son association avec Mehoffer, l’atelier se tourne essentiellement vers la production sacrée. Il s’associe avec d’autres artistes-peintres travaillant en sous-traitance de l’atelier, dont Fortuné Bovard, alors installé à Lausanne, Raymond Buchs et Jean-Edouard de Castella à Fribourg (par exemple KF_835 ; FR_1037 ; KF_1781). En 1926, Alexandre Cingria témoigne dans son ouvrage Souvenirs d'un peintre ambulant de sa déconvenue suite à la pose de ses vitraux de la nef d'Echarlens (par exemple GSL_133), qui auraient été peints et posés sans qu'il en ait été averti par un atelier qui n'est autre que l'atelier Kirsch & Fleckner et auquel l'artiste reproche de ne pas permettre aux artistes de peindre les vitraux eux-mêmes dans l'atelier (Cingria, 1933, p. 21). A la suite de cet incident, l'entreprise semble évoluer dans ses pratiques, comme le prouvent plusieurs vitraux réalisés avec Cingria, comme à l'église d'Attalens, Saint-Othmar de Broc et Siviriez, qui ont été peints de manière certaine par l'artiste lui-même (par exemple GSL_40 ; GSL_280 ; GSL_501) (Sauterel et Noverraz, 2022, p. 115-122). Durant les dernières années de son existence, l'atelier travaillera avec d'autres artistes dans le cadre de chantiers liés au Groupe de Saint-Luc, dont Willy Jordan, Gaston Thévoz, Oskar Cattani et Jean-Edouard de Castella (par exemple GSL_56 ; GSL_63 ; GSL_464 ; GSL_91). 
A la mort de Fleckner, en 1934, Kirsch reprend l’atelier, jusqu’à sa propre mort en 1938. Une année plus tard, les enfants des deux familles séparent l’atelier en deux et perpétuent le savoir-faire de leurs pères chacun de leur côté. Otto Kirsch s’occupe notamment de la part vitrail de la nouvelle société (nommée d'abord "A. Kirsch & Co", puis "Kirsch frères"), qui acquiert en 1950 un nouvel atelier à la rue Hans-Geiler à Fribourg (Pasquier, 1995, p. 100). C’est également probablement au moment de la mort de Kirsch que le fonds de l’atelier est divisé en deux. La part attribuée à l’atelier Kirsch a été déposée au Vitrocentre Romont et a fait l’objet d’un inventaire (Pasquier, 2000, p. 159). 
Les enfants de Fleckner conservent l’atelier de Villars-sur-Glâne, où Herbert Fleckner travaille d’abord avec Max Fleckner comme aide à la vitrerie, puis avec l’un des meilleurs ouvriers de Vinzenz Kirsch, Joseph Keller (Pasquier, 1995, p. 100). Le savoir-faire de l’atelier Herbert Fleckner sera perpétué par le maître-verrier Michel Eltschinger, formé au sein de la maison.

Bibliographie

Cingria, A. (1933). Souvenirs d’un peintre ambulant. Lausanne, Genève, [etc.], Suisse : Payot.

Pasquier, A. (1995). Du savoir faire du verrier : L'atelier Kirsch & Fleckner. Dans G. Bourgarel (dir.), Jozef Mehoffer : De Cracovie à Fribourg, ce flamboyant art nouveau polonais (p. 98-118). Fribourg, Suisse : Méandre. http://doc.rero.ch/record/232518/files/Pro_Fribourg_106-107_1995-r.pdf

Pasquier, A. (1999). Les vitraux de l’église de Cugy : conçus par l’abbé Edouard Gambon, élaborés par l’artiste Fortuné Bovard, réalisés par l’atelier Kirsch & Fleckner [mémoire de Licence inédit]. Université de Fribourg.

Pasquier, A. (2000, 11-13 mai). Le fonds d’atelier Kirsch & Fleckner et le vitrail catholique suisse de 1900 à 1914. Dossier de la commission royale des monuments, sites et fouilles, 7 : Art, technique et science : la création du vitrail de 1830 à 1930, 7, 157-167.

Sauterel,  V. et Noverraz, C. (2019). The functioning and development of Kirsch & Fleckner's workshop in Fribourg during the first half of the twentieth century. Folia Hisoriae Artium, Seria Nowa, 17, 59–71. https://digi.ub.uni-heidelberg.de/diglit/fha2019/0060

Sauterel V., Noverraz, C. (2022). Le statut de l’artiste et son évolution dans le cadre de sa collaboration avec l’atelier Kirsch & Fleckner. Actes du XXXe symposium du Corpus Vitrearum International et du XIe Forum pour la conservation et la technologie du vitrail, Barcelone 4–10 juillet 2022, 115–122.

Von Roda, H. (1995). Die Glasmalereien von Józef Mehoffer in der Kathedrale St. Nikolaus in Freiburg i.Ue. Berne, Suisse : Gesellschaft für Schweizerische Kunstgeschichte : Wabern-Bern : Benteli.