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Au sein des églises du Groupe de Saint-Luc, la création de chemins de croix a permis aux artistes d’expérimenter diverses techniques artistiques et parfois d'introduire des innovations intéressantes, comme à Sorens, où Emilio Maria Beretta réalise en 1935-1936 douze stations en marqueterie avec des insertions d’aluminium. Sa démarche est différente à l’église catholique d’Aubonne, où il crée une frise continue en peinture murale en 1941. L’architecte Dumas lui confie également la réalisation du chemin de croix de l’église Saint-Pierre-aux-Liens de Mézières, une tâche qu'il avait initialement envisagée pour Théophile Robert (Lettre à l’abbé Théophile Perroud, AP Mézières, 27 février 1937), et que l’artiste tessinois exécute avec la technique de la peinture sous verre. Mobilisé en raison de la guerre qui ravage l’Europe, son travail est retardé, et il ne parvient à l'achever qu’en 1943 (Torche-Julmy 1997, p. 16). Ce n’est pas la première œuvre de Beretta en peinture sous verre, puisqu’il réalise quelques années plus tôt le grand retable représentant la Délivrance de Saint Pierre pour la même église, ainsi qu'un antependium pour la Triennale d’art sacré de Milan en 1933, deux œuvres monumentales témoignant de sa maîtrise de la technique (Noverraz/Sauterel 2024, p. 166).
Beretta reprend les tons employés pour la décoration du chœur dans son chemin de croix. Il conçoit les quatorze stations sur la base de plans rapprochés sur les personnages principaux, qu'il rehausse par un fond gris ou bleu, un moyen lui permettant d'unifier les différentes stations et d’accentuer l’effet de continuité. À contre-courant des chemins de croix traditionnels, l'artiste simplifie la composition en supprimant les personnages secondaires et les décors superflus. Les scènes sont réduites à l’essentiel du message spirituel, toute l’action étant centrée sur la figure de Jésus. Les tons vifs des vêtements des personnages principaux (ocre, rouge et orange) accentuent l’aspect expressif de la scène et contrastent avec la palette plus sombre du reste de la composition dont l’arrière-fond est traité avec des éléments graphiques minimalistes, évoquant par moments un décor de théâtre. Enfin, il est à noter l’importance de la conception du cadre. Très original, ce dernier comporte des insertions en métal courbé qui redoublent l’éclat de l’œuvre par sa tridimensionnalité (Ambrosio 2024, p. 126).
Un carton préparatoire du chemin de croix de Mézières présentant les quatorze stations en défilé, ainsi qu’une maquette pour la première station grandeur nature, tous deux exécutés à la tempera, sont conservés dans deux collections privées (Torche-Julmy 1997, p. 21, note 44).
Datation
1942
Propriétaire
Paroisse de Notre-Dame de l’Épine, Mézières