Quatre petites fenêtres disposées côte à côte se composent de grands motifs géométriques bleus, jaunes, roses et gris. Elles sont toutes les quatre agencées en miroir, les deux du centre présentant des motifs différents des deux verrières extérieures, qui comportent un grand cercle dans leur partie supérieure.

Ce groupe de quatre petites fenêtres géométriques situé sur la paroi sud-ouest de l’église Saint-Maurice de Bussy, date, comme les deux autres qui se déploient dans la sacristie et l’ensemble des vitraux de la nef, de la construction de l’église en 1937-1938, sous la direction de l’architecte phare du Groupe de Saint-Luc, Fernand Dumas (Lauper, 2012. p. 284). Ces verrières font partie intégrante de la décoration réalisée par l’artiste fribourgeois Willy Jordan, gagnant du concours pour la polychromie et la décoration intérieure de l’église (Jordan, 1958, p. 2). Bien qu’aucune source dans les archives de la paroisse ne le confirme, nous pouvons supposer qu’elles sont aussi l’oeuvre du Fribourgeois. Elles ont été réalisées par l’atelier Kirsch & Fleckner, qui s’occupe également de l’exécution de la rose de la tribune de l’artiste Gaston Thévoz (Kirsch et Fleckner, 1938).

Dès l’origine, probablement pour des raisons financières, il est prévu de poser des vitraux ornementaux (appelés “grisailles”) à Bussy, à l’exception de la rose de la tribune (Villard, 1938). Après la consécration de l’église, la paroisse, manquant d’argent pour boucler les comptes, fait appel aux dons des paroissiens, anciens paroissiens et amis de la paroisse pour financer la fresque du choeur, le chemin de croix mais aussi les vitraux (Villard et Joye, 1938). Jordan choisit de réaliser pour la nef des verrières composées de rectangles colorés avec une croix sur la baie centrale, reprenant les teintes dominantes (bleu, ocre, beige et brun) de la polychromie des murs et de la décoration de la nef et du choeur. Dans la sacristie, il préfère des couleurs pastel (jaune, rose et bleu), afin de laisser pénétrer une lumière suffisante dans ce petit espace et anime les verrières de motifs géométriques en courbes. Il reprend, probablement pour gagner du temps, le dessin conçu pour les baies géométriques de la sacristie d’Orsonnens, tout en le complexifiant par l’ajout de pièces de verres supplémentaires.

Avant son travail à Bussy, Jordan avait gagné avec l’artiste fribourgeoise Jacqueline Esseiva les premiers prix pour la polychromie et la décoration intérieures des nouvelles églises de Sorens (1935) et d’Orsonnens (1936), dont les projets architecturaux sont également signés Fernand Dumas. Encore avant cela, en 1931, les deux artistes remportaient le premier prix dans la “catégorie artistes fribourgeois” lors du concours pour la décoration intérieure de l’église Saint-Pierre de Fribourg. Ces quatre projets décoratifs mettent en exergue une palette de coloris presque à chaque fois identique mais avec une dominante différente dans chaque lieu (Noverraz, Sauterel, 2020, p. 105-107).