Ce vitrail se situe sur la paroi sud-est du choeur de l’église Saints-Pierre-et-Paul d’Orsonnens, construction emblématique de l’architecte du Groupe de Saint-Luc Fernand Dumas.
Bien qu’il ne soit pas signé, comme son pendant qui lui fait face, nous pouvons l’attribuer à l’artiste Willy Jordan, celui-ci évoquant cette création dans sa biographie manuscrite (Jordan, 1958, p. 2, 5). Ces deux vitraux sont réalisés en collaboration avec l’atelier Kirsch et Fleckner entre 1936 et 1939, les sources issues des archives de la paroisse ne nous donnant malheureusement pas d’indications plus précises à ce sujet.
Willy Jordan et l’artiste fribourgeoise Jacqueline Esseiva gagnent ensemble le concours pour la décoration intérieure de l’église en 1936. Nous ignorons l'implication d'Esseiva dans le projet de décoration, son nom n'étant jamais cité dans les archives et les comptes de bâtisse (Vuarnoz, [1939], p. 4) et celle-ci décédant prématurément en 1938 à Paris. Jordan réalise la polychromie générale, les mosaïques du choeur et de la chaire, les ornements et vêtements liturgiques, ainsi que les vitraux du choeur, de la sacristie et du baptistère (Jordan, 1958, p. 2, 5).
Quand l’artiste commence son travail à Orsonnens, il vient de terminer la décoration intérieure de l’église de Sorens, pour laquelle il avait également remporté le concours avec Jacqueline Esseiva. Mais contrairement à Orsonnens, il n’y réalise aucun vitrail.
Les deux verrières du choeur d’Orsonnens sont consacrées au thème de l’Eucharistie, tout comme les motifs du plafond à caissons. Ils sont composés dans un style très graphique influencé par le métier de dessinateur, lithographe et graphiste que l’artiste pratique dans la première partie des années 1920 (Jordan, 1958, p. 1). Ces deux vitraux conjuguent des motifs purement géométriques et des éléments figuratifs, traités de la même manière. Les moutons, comme les buissons, sont composés de différentes pièces de verre aux forts contrastes (gris, brun, jaune, orange et blanc), ce qui leur apporte non seulement du volume mais aussi une belle lisibilité sur ce fond multicolore aux teintes chaudes.
Devenu au milieu des années trente un acteur incontournable du renouveau de l’art sacré en terre fribourgeoise, Jordan gagne en 1938 le concours pour la décoration et la polychromie intérieure de l’église de Bussy, autre construction nouvelle de l’architecte Dumas. La comparaison de la décoration de ces trois églises ainsi que son projet gagnant, dans la “catégorie artistes fribourgeois”, pour la décoration de l’église Saint-Pierre de Fribourg en 1931 révèle que l’artiste travaille avec une palette de couleurs presque identique mais avec une dominante différente pour chaque lieu (Noverraz, Sauterel, 2020, p. 105-107).