Médaillon ovale représentant l’Escalade de Genève, avec au centre une vue de la ville assiégée allant de la tour de l’Ìle au boulevard Saint-Léger. La partie inférieure figure le découpage de Plainpalais en champs et jardins, avec l’hôpital des pestiférés et des maisonnettes. La partie supérieure représente, sur fond de ciel étoilé, l’échelle de Jacob traversée par des anges qui vont et viennent en direction du symbole de la Trinité, un triangle rayonnant dans lequel est inscrit un oeil.
Le vitrail est accompagné de trois ensembles de fragments : seize fragments datés de 1902 qui s’insèrent dans la composition générale du vitrail ; onze fragments de petites dimensions dont l’origine n’est pas identifiée ; vingt et un éléments de bordure provenant d’un ancien montage de l’oeuvre (jusqu’en 1974).

Vitrail fortement remanié, nombreuses fissures (env. 38 fragments), nombreux éclats, quelques compléments à gauche et en haut, abrasion de certains tessons, rayures, mise en plomb moderne, trois ensembles de fragments.
Restaurations :
avant 1868, restauration avec des fragments qui ne sont pas d’origine.
1902, restauration de S. Perron, fabrication et insertion de trois fragments signés “SP”.
1927, restauration de Ch. Wasem, collages, doublages, mise en plomb, ajout probable d’une bordure.
1974, restauration complète par U. Wohlgemulth, tessons fragmentés recollés à l’epoxyde, décalages importants comblés à l’aide de résine synthétique, lacunes comblées à l’aide de résine polyester teintée et peinte en surface, remise en plombs, encadré.
2009, nettoyage de surface et consolidation des fissures par H. de Corneillan (cf rapport d’intervention).

Ce vitrail est l’une des rares vue de la cité genevoise peinte sur verre, avec le petit médaillon peint à la grisaille de 1655 (GE_2399). Il représente l’épisode historique genevois de l’Escalade, qui a eu lieu dans la nuit du 11 au 12 décembre 1602. Cet événement tient son nom de l’assaut des remparts de la ville de Genève par les troupes de mercenaires du duc de Savoie. Le panneau offre une vue fidèle de la face sud de la ville de Genève, telle qu’elle était au début du XVIIe siècle, au moment de son exécution (Dumur, 1952, p. 421). C’est en se basant sur des détails architecturaux que Deonna (1952, p. 54-58) et Fischer (2002, p. 66-68) ont proposé de dater le panneau vers 1603-1606. Dans son rapport d’intervention, la conservatrice et restauratrice H. de Corneillan (2009, p. 1) parvient également à une datation des parties centrales les plus anciennes vers 1603-1606.

Son format ovale longitudinale est très particulier. Il a probablement été conçu pour être inscrit dans un cadre ornemental et accompagné d’une inscription, éléments aujourd’hui perdus. Aucun exemple de vitrail du XVIIe siècle de ce format ou de format rectangulaire avec une pièce centrale ovale longitudinale n’est connu. Généralement, les vues de ville sont représentées sur les vitraux qui sont des donations des villes (cf. TG_136, BE_6751, BE_835). Ceci suggère que la scène de l’Escalade faisait à l’origine partie d’un vitrail offert par la ville de Genève. Les registres du Conseil de Genève citent plusieurs paiements pour des vitraux de ville au début du XVIe siècle, sans préciser leur iconographie (1927, p. 123–124).

Le peintre verrier n’est pas identifié. Alors que les peintres verriers genevois sont nombreux au XVIe siècle, ils “disparaissent presque complètement” au XVIIe siècle (Deonna, 1942, p. 369). Le vitrail monolithe pourrait être de la main d’un grand maître non identifié issu d’un atelier genevois (Aballéa, 2010, p. 402) ou d’un atelier de Suisse alémanique (Lapaire, 2008, p. 33).
Il semble s’être inspiré de divers dessins, gravures ou peintures genevoises pour représenter tant la cité que l’épisode historique (Deonna, 1952 ; Fischer, 2002 ; Lapaire, 2008, p. 32). Selon Lapaire (2008, p. 33), la figuration de l’échelle empruntée par des anges semble quant à elle prendre pour modèle la gravure du songe de Jacob de Matthäus Merian l’Ancien (1593-1650), publiée vers 1630 dans les Icones Biblicae. La gravure ne représente cependant pas d’oeil inscrit dans un triangle au sommet de l’échelle, mais le tétragramme en hébreux. Bien que cette iconographie de l’échelle soit déjà répandue au XVIe siècle, cette référence impliquerait une exécution du panneau après 1630 (Lapaire, 2008, p. 33). Selon Aballéa (2010, p. 402), la maîtrise technique de cette vue de nuit pourrait indiquer que le peintre verrier s’est également inspiré des oeuvres du peintre genevois Étienne Pascal (1591-1632), qui a réalisé des représentations nocturnes de l’Escalade entre 1622 et 1626 (cf. Fischer, 2002, p. 70-71). Si ces peintures ont bel et bien servi de modèles au peintre verrier anonyme, le vitrail pourrait être daté des années 1620 (Aballéa, 2010, p. 402), malgré que la représentation de la ville corresponde à son état entre 1603 et 1606.

L’emplacement d’origine et la provenance du vitrail demeurent inconnus. Le sujet de ce panneau invite à penser qu’il était destiné à orner les baies d’un important édifice public de Genève, peut-être même à l’hôtel de ville comme cela a été suggéré (Dumur, 1952, p. 419 ; Lapaire, 2008, p. 33). Après avoir été conservé en mains privées jusqu’en 1746, il a été offert à la Bibliothèque publique de Genève (Deonna, 1929, p. 84-85), puis donné en 1846 au Musée académique (CH AVG, Maca.A.6 ; Arch. BPU Dd 9, p. 97), avant de rejoindre en 1872 le Musée d’archéologie, puis vers 1902-1907 les collections du Musée d’art et d’histoire de Genève (Corneillan, 2009, p. 1).

Au cours de son histoire, le vitrail a connu plusieurs restaurations, dont cinq sont à ce jour documentées : avant 1868 ; en 1902 par le cartographe S. Perron dont la signature “SP” apparaît sur trois fragments ; en 1927 par le peintre verrier Ch. Wasem ; en 1974 par U. Wohlgemulth au Musée national suisse de Zurich ; en 2009 par la restauratrice H. de Corneillan au Musée Ariana (Corneillan, 2009, p. 3-6).

Cité dans :

• PV, 1845, p. [176-178].

• Registre, 1846, p. [41].

• PV, 1856, p. [2], n° 4.

• Hammann, 1868, p. 14-15.

• Deonna, 1923, p. 149, fig. 4 ; p. 61, note 1.

• Deonna, 1925, p. 336, n° 7.

• 1927, p. 123-124.

• Deonna, 1929, p. 84-85, n° 4702.

• Deonna, 1942, p. 296, fig. 194.

• Deonna, 1945, p. 293, note 5.

• Deonna, 1952, p. 54-58, n° 10, pl. XIII-XIV.

• Dumur, 1952, p. 418-422.

• Godoy, 1980, p. 5 et 24.

• Loche, 1982, p. 176-178, n° 77.

• Fischer, 2002, p. 66-68, fig. 22.

• Chenal, 2007, p. 128, note 45.

• Lapaire, 2008, p. 32-33, fig. 38.

• Corneillan, 2009.

• Aballéa, 2010, p. 402 ; remarque : “vers 1620”.