Ce modèle de vase (20) fut créé à une période précoce de la Verrerie artistique (1930-1964). Les sources dont nous disposons sont des catalogues de la Verrerie de St-Prex, certains inédits. Sur un dépliant (Verreries de St-Prex, 1930), il est présenté en deux tailles (sans précision). Il apparaît aussi dans le catalogue non publié, probablement utilisé par les représentants entre 1931 et 1935 (Verreries de St-Prex, 1931, n° 102, H 20 cm). Le catalogue de vente imprimé de 1935 le propose également (Verreries de St-Prex, 1935, n° 20, 19). Un répertoire non publié de toute la production artistique, dont les numéros d’inventaire correspondent à ceux des catalogues de 1935 à 1960, le propose en deux tailles: H 20 et 21 cm (Répertoire non publié, 1935–1964). Sur la liste des prix de 1951, il n'est plus répertorié (Verreries de St-Prex, 1951).
D’après ces sources, ce modèle mesurant entre H 16.5 et 21.5 cm, fut élaboré en vue du Comptoir suisse de 1930. Il est présent dans le corpus avec des motifs de gentianes, de coucher de soleil et d’œillets, tous peints à froid, ainsi que d’un Tilbury gravé à l’acide.
Dans la littérature secondaire, ce modèle apparaît chez Dreyfus (Dreyfus, 1981, 4-6), dans la brochure qui accompagne l'exposition du Musée Ariana (Anthonioz & Quintero Pérez, 2014) et chez Anthonioz & Quintero Pérez (Anthonioz, S. & Quintero Pérez, A., 2017, 634).
Inspiré des vases Art nouveau avant tout français (Cappa, 2001, 367‑368), on retrouve les sujets de l'École de Nancy, mais sans les techniques sophistiquées qui lui sont propres. Soufflés en verre incolore, ils sont sablés puis peints à froid à l'aide de pochoirs, tandis que les fonds sont traités à l'aérographe. Les aquarelles qui ont servi de modèles – à motifs végétaux, récréatifs ou proposant des vues de pays lointains – proviennent des archives du Musée du verrier (Verreries de St-Prex, Modèles de Vases, 1930). Certains critiques ont mal interprété cette technique, suggérant que le vase avait été recouvert d’une peinture blanche: "Die an der Mustermesse gezeigten, mit einer milchigen Masse überschmierten, vielfach mit Segelschiffen und andern Naivitäten bemalten (…) Stücke (…)", ("Rückblick auf die Schweizerwoche", 1933, XXXVIII). À une époque où l’art concret était de mise, ces vases d’inspiration Art nouveau sortaient du lot. Par ailleurs, cette technique appartient au domaine de la céramique; elle est plutôt inhabituelle pour le verre.
Le vase présent est lui aussi réalisé en verre incolore, mais la technique utilisée le distingue des autres vases du même modèle. Il traduit une grande maîtrise de la gravure à l'acide, ce qui en fait une pièce unique, commanditée pour une occasion spéciale. La dédicace de Max-Henri Cornaz révèle qu'il s'agit d'une oeuvre à caractère privé, tandis que le monogramme "LF", placé sur le bas de la panse, sert de signature. Il permet d'identifier le verrier Frantisek Landgraf. La tradition orale, qui lui attribuait les pièces gravée à l'acide, se voit ainsi confirmée.