Le parcours artistique du monogrammiste VBL est un exemple édifiant d’un peintre verrier qui, poussé certainement par des enjeux économiques, a quitté l’ancienne Confédération pour émigrer vers l’Italie et y pratiquer la technique de la peinture sous verre entre 1625 et 1650. Dans une collection fribourgeoise privée existent deux vitraux héraldiques signés du monogramme VBL datant de 1625. L’un est aux armes de Nicolas de Gléresse et d’Elisabeth Fégely, l’autre a été offert par le peintre verrier Peter Heinricher. Un troisième vitrail héraldique, non signé et qui date également de 1625, peut, en raison de similitudes stylistiques et épigraphiques, être attribué à VBL. Il porte les armes de Jean Fégely, officier au service du roi de France Louis XIII avant d’entrer en 1625 dans l’ordre des jésuites à Rome, où il fut consacré prêtre en 1629 (Bergmann 2014 : 413–415). Maître VBL est également connu pour avoir réalisé des tableaux de peintures sous verre de petit format, très probablement sur commande. Il excelle dans la technique de l’Amelierung, comme le témoigne « Le paysage de ruines » de la collection Ruth et Frieder Ryser, conservé aujourd’hui au Vitromusée Romont (PSV_658) qui représente une gravure en trompe-l’œil. Mais son activité est surtout consacrée à l’exécution de plaquettes de verre destinées à orner des armoires de cabinet de facture napolitaine. L’intérêt de la bourgeoisie naissante pour l’art et pour ce type de meubles conditionne l’apparition d’une production standardisée sur le marché napolitain qui s’adapte au goût et au porte-monnaie du client. Notre artiste a, selon toute vraisemblance, dû trouver dans la ville parthénopéenne une configuration socio-économique lui permettant de s’insérer dans un marché de niche rentable.
Une centaine de plaquettes de verre, destinées à la décoration de ces cabinets, peut être attribuée à VBL ou à son entourage. Peu de panneaux sont monogrammés et un seul est pourvu d’une date : 1640. Considérant que le verre est un support fragile, vulnérable au transport, on peut estimer, au vu du grand nombre de panneaux recensés, que cette production devait être bien organisée et florissante. VBL a dû jouer un rôle constitutif au sein d’un atelier qu’il dirigeait dans la ville de Naples.
Un article qui dévoile l’identité de ce peintre verrier et peintre sous verre et qui analyse le contexte socio-historique dans lequel il a évolué, est actuellement sous presse et paraîtra aux éditions Artem, Naples.
Bergmann, U. (2014). Die Freiburger Glasmalerei des 16. bis 18. Jahrhundert = Le vitrail fribourgeois du XVIe au XVIIIe siècle. Peter Lang.
González-Palacios, A. (1984). Il tempio del gusto : le arti decorative in Italia fra classicismi e barocco : Roma e il regno delle Due Sicilie. Longanesi.
González-Palacios, A. (1993). Il gusto dei principi : arte di corte del XVII e del XVIII secolo. Longanesi.
Labrot, G. (2010). Peinture et société à Naples : XVIe-XVIIIe siècle, commandes, collections, marchés. Champ Vallon.
Ryser, F. (1991). Verzauberte Bilder : die Kunst der Malerei hinter Glas von der Antike bis zum 18. Jahrhundert. Klinkhardt & Biermann.
Ryser, F., & Salmen, B. (1995). “Amalierte Stuck uff Glas, Hinder Glas gemalte Historien und Gemäld” : Hinterglaskunst von der Antike bis zur Neuzeit. Schlossmuseum Murnau.