Nom

Dunand, Eugène

Variantes du nom
Dunand, Eugène-Marc
Dates de naissance et de décès
Genève 1893–1956 Genève
Auteur·e et date de la notice
Camille Noverraz 2015; Camille Noverraz 2023
Lieux avec objets
Données biographiques

Eugène Dunand effectue une première formation à l'école des arts industriels de Genève. D'après Patrick Rudaz, il fait la connaissance d'Alexandre Cingria et de Maurice Denis, futures grandes figures du renouveau de l'art sacré suisse et français, sur le chantier de l'église Saint-Paul de Grange-Canal où les deux artistes travaillent dès 1915. Il suit ensuite Denis à Paris et intègre les Ateliers d'art sacré, école d'art religieux moderne fondée en 1919 par Denis et Georges Desvallières (Rudaz, 2009, p. 110). Dès son retour à Genève, il achève sa formation dans l'atelier de Georges Jourdin (anciennement celui d’Enneveux et Bonnet), situé aux Acacias (Rudaz, 2009, p. 110), dont il reprend la tête en 1920 (Poiatti, 2008, p. 99, 104). Il figure dès lors parmi les rares artistes suisses de la première moitié du XXème siècle à être à la fois peintre-verrier et maître-verrier, c'est-à-dire capable de maîtriser tout le processus de fabrication d'un vitrail depuis les projets jusqu'à l'exécution, qu'il s'agisse de ses propres vitraux ou de ceux dessinés par d'autres artistes.

En 1920, il signe ses premiers vitraux en tant que successeur de Jourdin à l'église Saint-Charles Borromée d'Avusy (par exemple GE_01.01), dans un style encore empreint d'historicisme. Il ose aller vers plus de modernité avec ses vitraux de l'église Saint-Sylvestre de Compesières, composés entre 1920 et 1922 (par exemple GE_02.03).
Entre 1924 et 1929, l'artiste collabore pour la première fois avec Alexandre Cingria au cycle des vitraux de l'église Sainte-Croix de Carouge, où il réalise tant des verrières dessinées par Cingria que ses propres vitraux (par exemple GE_04.05). Cette collaboration le rapproche du Groupe de Saint-Luc, Société artistique catholique dont Cingria est l'un des fondateurs, bien que Dunand n'y ait jamais adhéré de par sa confession protestante (Rudaz, 2009, p. 111). Entre 1924 et 1925 il travaille ainsi à nouveau avec Cingria pour l'église de Semsales dans le canton de Fribourg, l'une des premières grandes constructions religieuses de l'architecte phare du Groupe de Saint-Luc, Fernand Dumas. Il réalise les vitraux de Cingria dans le choeur, ainsi que trois vitraux de sa main dans la chapelle de la Vierge et obtient ensuite la commande de sept verrières supplémentaires pour la nef côté sud-ouest en remplacement de l’artiste fribourgeois Jean-Edouard de Castella, dont les projets avaient déplu (Radin, 2011, p. 31-33). Cette importante commande lui permet de développer son propre style, encore très influencé par Cingria dans ses vitraux de la chapelle de la Vierge (par exemple GSL_78 ; GSL_86). Il obtient parallèlement d'autres commandes sur le territoire genevois, pour l'église Saint-Julien de Meyrin en 1926 (GE_39.05) et l'église Saints-Pierre-et-Paul de Meinier, en 1927, où il conçoit quatre vitraux très originaux dans leur composition et leur style (par exemple GE_37.02).

En 1929, il est à nouveau appelé à oeuvrer dans une construction nouvelle de Fernand Dumas pour l'église Notre-Dame-de-l'Assomption de Finhaut. Alors que Cingria en est le décorateur principal, Dunand obtient cette fois-ci le mandat des vitraux du choeur, déployant une riche iconographie mariale (par exemple GSL_108), ainsi que ceux du bas-côté sud-est de la nef (par exemple GSL_110). Le style de ces derniers est si proche de celui de Cingria, avec la richesse des textures proposés par l'emploi des verres industriels et des cabochons dans la bordure, que leur composition lui a souvent été attribuée (Gross, 2006, p. 19 ; Rudaz, 2009, p. 111). Or, si l'utilisation de nombreux verres spéciaux devient une constante dans les vitraux de Cingria dès ses vitraux de Sainte-Croix de Carouge, c’est probablement grâce à sa collaboration avec Dunand et non le contraire. Comme le mentionne le papier en-tête de son atelier, il y réalise aussi des vitraux pour appartements, dans lesquels l’utilisation de tels verres était assez courante. Cingria aura ainsi pu puiser dans la réserve de l'atelier pour servir la réalisation de ses vitraux au gré de son imagination. Après Finhaut, Cingria entamera une collaboration accrue avec l'atelier Chiara de Lausanne, et les deux artistes travailleront séparément ("Vitraux d’art exécutés par la maison Chiara […]", 1931).
Durant la décennie 1920-1930, Dunand est l'auteur de plusieurs autres vitraux dans le canton du Valais (Conthey et Morgins en 1924, Vouvry en 1928, Vésenaz en 1929) (Rudaz, 2009, p. 111).

Au début des années 1930, l'artiste obtient une nouvelle commande de vitraux dont la composition est très proche de ceux du choeur de Finhaut pour l'église Saint-Antoine de Padoue à Genève (1930) (dont GE_27.04).
En 1938, Dunand obtient l'un de ses mandats les plus importants. Il s'agit des vitraux de l'église Saint-Joseph réalisés entre 1938 et 1948 (par exemple GE_12.21 ; GE_12.03) dans le cadre de la rénovation de l'édifice entreprise par Jules Zumthor, qui s'accompagne d'un important programme décoratif conçu en grande partie par des membres du Groupe de Saint-Luc (Bischoff, 2009, p. 41 ; Poiatti, 2008, p. 123-128). Il s'agit de son dernier cycle connu.

Bibliographie

Bischoff, C. (2009). Eglise Saint-Joseph. Dans C. Courtiau (dir.) XXe : Un siècle d'architecture à Genève : promenades. (p. 41). Gollion, Suisse : Infolio.

Gross, S. (2006). Eglise de Finhaut – un monument exceptionnel signe de renouveau. Dans : Eglise paroissiale de Finhaut : restauration 2004-2005 (p. 7-27). Finhaut, Suisse : Paroisse de Finhaut.

Poiatti, M. (2008). Vitrail et modernité. Dans L. Borel (dir.), Emotion(s) en lumière : le vitrail à Genève (p. 98-141). Genève, Suisse : APAS Association pour la promotion de l'art sacré : La Baconnière Arts.

Radin, G. (2011). Il carteggio Gino Severini Jacques Maritain (1923-1966), Museo di Arte Moderna et Contemporanea di Trento e Rovereto, Italie : Leo S. Olschki Editore, 2011.

Rudaz, P. (1998). Carouge, foyer d’art sacré, 1920-1945. Carouge, Suisse : Ville de Carouge.

Rudaz, P. (2009). DUNAND (Eugène, 1893-1956). Dans J. M. Marquis (dir.), Dictionnaire carougeois : Arts à Carouge : Peintres, sculpteurs et graveurs (tome IV B, p. 110-111). Carouge, Suisse : Ville de Carouge.

Torche, M. T. (1997). Les artistes de l’église de Semsales. 700 ans Châtel-Saint-Denis, 78. http://doc.rero.ch/record/232520/files/Pro_Fribourg_117_1997-r.pdf

Vitraux d’art. Industrie suisse. Exécutés par la Maison Chiara de Lausanne sur les projets et avec la collaboration d’Alexandre Cingria [Catalogue publicitaire]. (1931). Centre des littératures en Suisse romande (CLSR), Lausanne, fonds Alexandre Cingria.