Ce vitrail a été réalisé en 1938-1939 par l’artiste vaudois Gaston Faravel et un atelier inconnu, pour la sacristie de l’église de Villars-le-Terroir.
En 1938-1939, l’architecte emblématique du Groupe de Saint-Luc, Fernand Dumas, est mandaté pour la rénovation du choeur de l’église et fait appel à quelques artistes membres de cette Société artistique catholique afin d’obtenir un ensemble mêlant plusieurs arts décoratifs. Gaston Faravel réalise notamment les peintures ornant le panneau de bois sur le thème de la vie de saint Nicolas, patron de l’église, entourant le vitrail de la Crucifixion, oeuvre du Fribourgeois Gaston Thévoz (GSL_607). Il peint également un décor comprenant des symboles eucharistiques sur l'arc du choeur et des Évangélistes autour de la clé de voûte, qui a été partiellement préservé (Diesbach, 1939, p. 57).
L’ancienne sacristie ayant brûlé en 1921, l’architecte Fernand Dumas profite de la rénovation pour la reconstruire (Pittet, [2020], p. 101, 110). Comme de nombreuses sacristies dessinées par l’architecte, elle comprend des meubles en bois construits sur mesure et travaillés dans un style Art déco caractéristique. Afin d’orner cet intérieur, une mosaïque d’un artiste non identifié, peut-être Faravel, est insérée dans l’une des parois, représentant des cerfs s’abreuvant à une source jaillissant d’une montagne sur laquelle se dresse la croix. Dans un souci de décoration mais aussi afin de cacher l’intérieur des regards extérieurs tout en assurant une arrivée lumineuse suffisante, Faravel conçoit également un vitrail sur le thème du Bon Berger qui se déploie sur l’ensemble des cinq fenêtres du côté sud-est.
Ce vitrail représente, dans la fenêtre centrale, inscrit dans un encadrement en forme de losange, un Christ en Bon berger traité dans des tons de rouge, ressortant sur un fond bleu. Bien qu’ayant opté pour une représentation traditionnelle de cette scène, le corps du Christ, ainsi que celui de l’agneau, est traité avec des verres au découpage géométrisé, faisant la transition avec le reste de la verrière, entièrement non-figurative et construite sur l’agencement de formes géométriques d’une grande modernité. L’artiste a dessiné finement le modelé du visage et de la peau avec de la peinture à la grisaille, qu’il emploie également sur le reste des fenêtres pour habiller les différents éléments de sa composition non-figurative et renforcer les jeux de texture des verres employés. Ce travail très poussé des verres rappelle le cycle de vitraux de l’artiste à la chapelle catholique de Bière (1930), où il utilise une peinture à la grisaille posée de manière très minutieuse afin de magnifier l’effet décoratif de chaque verre (Caboussat, 2022, p. 101-106).
Il existe dans le fonds Kirsch & Fleckner un carton pour ce vitrail (KF_1256), qui montre uniquement la partie centrale avec le Christ.
Le vitrail de la sacristie de Villars-le-Terroir constitue l’unique expérience de peintre-verrier de Faravel depuis le cycle de Bière. Prenant part à plusieurs chantiers dirigés par des architectes du Groupe de Saint-Luc, dont il devient membre dès sa conversion en 1930 (Societas Sancti Lucae, 1932), les arts du verre ne représentent qu’une petite part de l’activité artistique de l’artiste, qui s’est surtout déployé dans le domaine de la peinture murale, des décors de théâtre et de la peinture de chevalet (de Diesbach, 1939, p. 9, 61, 17-23, 56-58 ; Creton, 1993, p. 22-25). Bien que très différents dans leur ampleur et leur conception, tant le cycle de Bière que ce vitrail de Villars-le-Terroir traduisent le savoir-faire de décorateur de l’artiste, qui parvient à amalgamer par le jeu des coloris et des formes les parties décoratives aux scènes figurées, et à donner à une oeuvre bidimensionnelle une véritable densité grâce au travail des textures.