Cette fenêtre ornementale à losanges, située sur la tribune de la chapelle catholique d’Aubonne, a été réalisée en 1941 dans le cadre de la construction de l’édifice par les architectes François de Reynold et Albert Cingria. Elle a probablement été conçue par l’atelier Chiara de Lausanne, qui réalise la même année les vitraux de la nef sur les projets de l’artiste originaire du Tessin Emilio-Maria Beretta.
A l’origine, la seule décoration prévue était une peinture murale. C’est à la suite d’un don pour les vitraux que leur réalisation est envisagée. L’artiste genevois Marcel Poncet, à la fois maître-verrier et peintre-verrier et installé à Vich, non loin d'Aubonne, est d’abord pressenti pour leur réalisation. François de Reynold indique dans une lettre à l’artiste que l’étude de la décoration murale et des vitraux se fera parallèlement, en plaçant au premier plan la première (De Reynold, 1940). En effet, l’accent va être mis sur le vaste chemin de croix en peinture murale, confié à l’artiste Emilio-Maria Beretta, gendre du principal animateur du Groupe de Saint-Luc, Alexandre Cingria, qui est aussi le père de l’architecte de la chapelle, Albert. Quelques années avant, en 1939, Beretta avait peint une monumentale peinture murale à l’église du Christ-Roi du Petit-Lancy, dont les parties narratives sont agencées en une frise continue (Chamay, 2001, p. 35-44), parti qu’il réutilise dans le chemin de croix d’Aubonne. Sans doute afin de favoriser l’harmonie stylistique entre les différents éléments de la décoration, c’est Beretta qui est aussi chargé de la réalisation des six vitraux de la nef, consacrés aux Litanies de la Vierge. La recherche de cohérence entre les différents arts décoratifs et l’architecture apparaît une nouvelle fois au coeur de la démarche des artistes appartenant, comme Beretta et les architectes Cingria et de Reynold, à la mouvance du Groupe de Saint-Luc (Andrey, 1995, p. 33-45).
Malgré sa simplicité, cette fenêtre s’intègre dans le projet de décoration d’ensemble. Conçue dans un dégradé de coloris allant des teintes chaudes, à l’extérieur, aux teintes froides, au centre, elle fait écho aux six vitraux de la nef, eux-mêmes construits autour de l’opposition principale du rouge et du bleu (par exemple GSL_557). Leur composition en losanges rappelle également les deux groupes de sept fenêtres situées de part et d’autre du choeur (GSL_552 et GSL_556), dont les teintes chaudes et les dominantes jaune-or, contrastées par quelques losanges plus foncés permettant de tamiser l’éclairage, s’harmonisent avec le retable du maître-autel brodé par l’artiste Raoul Bovy-Lysberg sur un carton de Beretta (Lincio, 2002, p. 18). Tout comme celles du choeur, cette verrière est traitée avec des verres présentant un léger effet de texture ressemblant à des hachures, permettant encore une fois de contenir la puissance de l’arrivée lumineuse.