Nom

Chapelle du Pensionnat Saint-Charles

Adresse
Rue du Château 126
1680 Romont
Hiérarchie géographique
Coordonnées (WGS 84)
Auteur·e et date de la notice
Camille Noverraz 2024
Informations sur le bâtiment / l'institution

Le pensionnat Saint-Charles voit le jour en 1884, lorsque l’évêque du diocèse Mgr Mermillod, achète une maison privée dans les hauts de Romont afin d’y loger des jeunes gens et particulièrement ceux se destinant à la prêtrise. Cette maison, nommée « La Ratière » et ses pensionnaires les « Ratons » peut loger environ une soixantaine de jeunes, ce qui s’avère rapidement insuffisant. En prévision de l’avenir, le chanoine directeur achète peu à peu les terrains avoisinants en vue d’un agrandissement (Roulin, 1930, p. 99-101).
En 1913, la Société Saint-Charles voit le jour, oeuvrant pour la construction d’un nouveau bâtiment qui pourra accueillir le pensionnat mais aussi les classes de l’École secondaire. Le pensionnat et l’École, bien qu'indépendants puisque l'un dépend du pouvoir ecclésiastique et l'autre du pouvoir civil, sont réunis et dirigés par un même directeur membre du clergé de Romont (Page, [1959], p. 20). L’évêché fournit le mandat de construction des nouveaux locaux à Fernand Dumas, alors tout jeune architecte de vingt ans, dont il s’agit de la première commande. Le bâtiment est inauguré en octobre 1913 (Roulin, 1930, p. 101).
Déjà à ce stade, il est prévu de compléter le pensionnat par une annexe renfermant une chapelle et des salles de classe. Dumas soumet un nouveau projet, mais la crainte de provoquer un endettement, puis la guerre, interrompent cette démarche. La construction d’une chapelle s’avère cependant particulièrement cruciale, l’horaire du collège s’accommodant mal avec ceux de l’église paroissiale, tandis que la présence des élèves est source de dérangement pour les paroissiens, comme le relève le directeur de l'école, le curé Tissot (Tissot, 1924). Ce dernier rachète alors les bâtiments et terrains attenants, permettant d'étendre le pensionnat en direction du château et transformant la physionomie du quartier. C'est Dumas qui est chargé à nouveau des travaux de cette aile, reliée au premier bâtiment par un haut mur d'enceinte délimitant la propriété du pensionnat, tandis que du côté de la colline La Ratière est détruite, laissant la place à un préau et une cour. Le nouveau bâtiment, érigé de 1927 à 1928, entièrement en béton armé, comprend de nouvelles salles de classe et la chapelle, bénie en avril 1929 par l'évêque Mgr Besson, couronnant la fin des travaux (Roulin, 1930, pp. 103-105).

Malgré ses dimensions modestes, cette chapelle a fait l'objet d'un travail très soigné de la part de l'architecte et des artistes chargés de la décorer. Dumas tire profit de la situation de l'édifice, inscrite dans la toiture en croupe du pensionnat, pour placer l'espace de la nef sous un berceau reposant sur une série de colonnes marquant la séparation avec d'étroits bas-côtés, dont les parois sont aussi inclinées, formant avec la voûte la forme générale d'un trilobe. La chapelle profite de l'éclairage des six lucarnes à demi-croupe de la toiture ouvrant sur les bas-côtés, garnies de vitraux d'une très grande complexité technique et iconographique de l'artiste phare du Groupe de Saint-Luc, Alexandre Cingria. Cet apport lumineux est complété par la présence de trois ouvertures ajourées en forme de losange au sommet du berceau de la nef, garnies de vitraux également conçus par Cingria dans des tons de bleus et verts. Une quatrième ouverture, circulaire, surmontée sur la toiture d'une coupole vitrée, apporte un éclairage zénithal dans le choeur.
La décoration de la chapelle est confiée à l'artiste vaudois Gaston Faravel, qui conçoit la polychromie générale de l'édifice, les peintures décoratives et la grande peinture murale du choeur. L'artiste concevra la décoration de plusieurs églises et chapelles dans le cadre de sa collaboration avec Fernand Dumas et d'autres architectes du Groupe de Saint-Luc, notamment à la chapelle catholique de La Sarraz, à la Marienkirche de Berne et à l'église de Siviriez (Diesbach, 1939, pp. 56-58). Fait surprenant, l'artiste a refait par trois fois la peinture murale du choeur faisant office de retable, dont il n'était pas satisfait, en changeant à chaque fois son iconographie. Dans l'article publié par le chanoine Roulin dans les Nouvelles étrennes fribourgeoises en 1930, une photographie illustre un premier état de cette peinture, qui représentait deux anges affrontés au dessus du tabernacle (Roulin, 1930, p. 104). Une photo de la deuxième version est visible dans la monographie de Faravel : le Christ bénissant deux personnages, l'un masculin et l'autre féminin, agenouillés à ses côtés (Diesbach, 1939, p. 30). Enfin, la troisième version, celle qui est encore visible actuellement, a été réalisée en 1946 et représente le patron du pensionnat, saint Charles Borromée, donnant la communion à saint Louis de Gonzague sous le regard de saint Ignace et saint Ambroise (Page, 1946, p. 7).
L'orfèvrerie et le tabernacle en émail peint est également l'oeuvre de l'orfèvre attitré du Groupe de Saint-Luc, Marcel Feuillat, tandis que l'autel, dessiné par Dumas, est garni de mosaïques, première oeuvre de l'artiste genevoise Marguerite Naville dans cette technique (Aubert, 1945, p. 69).

La chapelle fait l'objet d'une rénovation en 1977 sous la supervision de la Commission d'art sacré, qui accepte que les peintures des parois et de la voûte soient refaites dans des teintes légèrement plus claires qu'à l'origine, tandis qu'elle demande à ce que les peintures de Faravel soient préservées (Perroud, Richoz, 1977).

Bibliographie

Aubert, J. (1945). Marguerite Naville. Neuchâtel, Suisse : La Baconnière.

Diesbach, F. (1939). Gaston Faravel. Neuchâtel, Suisse : La Baconnière.

"Le Groupe de St Luc et la Chapelle St Charles", s.d. Documentation inédite. Romont : Pensionnat Saint-Charles.

Page, L. ([1959]). Page d’histoire romontoise. L’école latine et l’école secondaire (1859-1959). Romont, Suisse : École secondaire de la Glâne.

Page, L. (1946, 26 octobre). « Un beau tableau de Faravel à Romont ». La Liberté, 7. http://www.e-newspaperarchives.ch/?a=d&d=LLE19461026-01.2.32

Perroud, T., Richoz, J. (1977, 31 janvier). Lettre au président du Conseil de paroisse de Romont. Archives du Service des Biens culturels, Fribourg.

Roulin, M. (1930). Le Pensionnat Saint-Charles à Romont. Nouvelles étrennes fribourgeoises, 97-107.

Tissot, C. (1924, 27 août). Lettre à Mgr Marius Besson. Archives de l’Evêché de Fribourg (AEvF), Suisse. Boîte 17, dossier « Pensionnat St-Charles 1912-1920 ».

Photographies