Cette rose dédiée à sainte Cécile, donation de la société de chant la Cécilienne, se trouve sur la tribune des orgues de l’église de Bussy. L’artiste fribourgeois Gaston Thévoz en est l’auteur, en collaboration avec l’atelier Kirsch et Fleckner (Thévoz, 1938a). Elle date, comme l’ensemble des vitraux de la nef, de la construction de l’église en 1937-1938, sous la direction de l’architecte phare du Groupe de Saint-Luc, Fernand Dumas (Lauper, 2012. p. 284).
Dans le protocole de la séance de commission de bâtisse du 28 mars 1938, il est fait mention pour la première fois du vitrail de la tribune dont le sujet définitif est déjà évoqué, tout comme son donateur (Villard, 1938). Thévoz reçoit un acompte de 400 francs pour le vitrail début juillet 1938 (Thévoz, 1938b), puis un second paiement de 350 francs fin juillet pour son travail exécuté (Thévoz, 1938c). Au vu de la date de ces versements, on peut en déduire que la commission de bâtisse a souhaité que la rosace soit posée pour la consécration de l’église le 17 juillet, ce que confirme un article dans la chronique broyarde du journal d’Estavayer. L’auteur y indique que “la tribune est éclairée par une rosace, vitrail d’une belle tenue, représentant Ste Cécile” (“Chronique broyarde [...]”, 1938).
Les descendants de l’artiste ont établi un catalogue raisonné en ligne de l’oeuvre du peintre, où sont aussi présentés les vitraux réalisés par Thévoz, ainsi que quelques dessins préparatoires (maquettes et cartons) en possession des descendants ou en mains privées. Pour Bussy, il s’y trouve trois maquettes : deux dessins préparatoires et un dessin définitif (Thévoz, s.d.). La comparaison des deux dessins préparatoires avec la verrière nous permet de constater que les éléments principaux ont rapidement trouvé leur place : Cécile est disposée au centre et les anges sur les quatre axes, alors qu’une large bordure encadre le sujet principal. Des modifications néanmoins importantes ont été effectuées. Sur les deux dessins préparatoires, la sainte, petite, n’occupe que le centre de la composition. La première fois elle est représentée assise devant l’orgue (“Rosace II”, s.d.) et la seconde fois elle est figurée en buste, de face à côté de son instrument (“Rosace I”, s.d.). Sur le projet définitif (“Rosace III”, s.d.), la sainte prend de l’ampleur pour s’étendre sur une surface beaucoup plus vaste. Pour les anges musiciens, alors qu’ils sont nombreux sur la première maquette et que certains chantent, ils ne sont plus que quatre sur le second dessin et presque dans leur état définitif. En ce qui concerne la bordure, l’artiste a modifié les aspects décoratifs de celle-ci. Dans des losanges sur le premier projet, les anges seront finalement placés dans des médaillons sur la seconde maquette et le vitrail. Sur le second dessin, les éléments décoratifs entourant les médaillons sont aussi définitifs. Au fil de ses travaux préparatoires, Thévoz a su mettre en valeur les lignes fortes de la structure de la rose pour proposer une sainte se déployant sur toute la partie centrale, tout en privilégiant des couleurs vives (vert, orange, jaune) qu’il intègre dans une composition dominée par le bleu et le rouge, s’inscrivant dans la tradition des roses médiévales.
Thévoz est membre du Groupe romand de Saint-Luc dès 1932. L’année suivante et en 1937, il participe à leurs expositions à Genève et Lausanne (Thévoz, 2012, p. 8-9). Lorsqu’il réalise la rose de la tribune de Bussy, il a déjà travaillé à deux reprises pour l’architecte Fernand Dumas. La première fois en 1937 lors de la restauration de la chapelle Notre-Dame-du-Bois à Villaraboud (Lauper, 2012b, p. 190), où il réalise deux verrières pour le chevet (Annonciation et Nativité). La seconde fois, également en 1937, il conçoit trois verrières à médaillons dans le cadre de la rénovation du choeur et de la tribune de l’église catholique Saint-Etienne de Bottens (Courtiau, 2011, p. 344). Bussy est donc sa troisième collaboration avec Dumas, mais aussi sa troisième réalisation verrière.