La provenance de ce rondel n’est pas établie. Celui-ci est apparu en 1991 sur le marché de l’art en Suisse. Il a été acheté à cette occasion par un collectionneur établi en Allemagne qui l’a vendu en 2019 au Vitrocentre Romont, avec 28 autres pièces, toutes datant des XVe et XVIe siècles et provenant des anciens Pays-Bas voire, pour quelques-unes d’entre elles, des pays germaniques (Romont, Vitromusée Romont, documentation, inv. VMR 911, consultée le 4 avril 2022).
Le rondel représente le troisième jour de la création du monde par Dieu le Père, une scène vétérotestamentaire tirée de la Genèse (Gn 1:9-13) : „Et Dieu dit : « Les eaux qui sont au-dessous du ciel, qu’elles se rassemblent en un seul lieu, et que paraisse la terre ferme. » Et ce fut ainsi. Dieu appela la terre ferme « terre », et il appela la masse des eaux « mer ». Et Dieu vit que cela était bon. Dieu dit : « Que la terre produise l’herbe, la plante qui porte sa semence, et que, sur la terre, l’arbre à fruit donne, selon son espèce, le fruit qui porte sa semence. » Et ce fut ainsi. La terre produisit l’herbe, la plante qui porte sa semence, selon son espèce, et l’arbre qui donne, selon son espèce, le fruit qui porte sa semence. Et Dieu vit que cela était bon. Il y eut un soir, il y eut un matin : troisième jour“.
En 2008, Klaus Tiedemann rapprocha ce vitrail d’une série de rondels représentant la création du monde et attribuée à Dirk Jacobsz Vellert (Tiedemann 2008, p. 12 ; id. 2009, p. 34-35). Né vers 1480 et documenté à Anvers de 1511 à 1547, Dirk Jacobsz Vellert est un dessinateur, graveur, peintre et verrier dont la vie et l’oeuvre ont été reconstitués par Gustav Glück en 1901 (Glück 1901, p. 1-34), puis par Ellen Konowitz en 1992 (Konowitz 1992).
En 1997, cette dernière fit la découverte dans une collection privée à Rotterdam d’un rondel représentant la création d’Eve qu’elle attribua, sur la base du style, à Dirk Vellert ou à son entourage, et auquel elle rapprocha un second rondel représentant le premier jour de la création, anciennement conservé au Kunstgewerbemuseum de Berlin, détruit durant la Seconde Guerre mondiale mais documenté par une ancienne photographie : sur cette base, elle émit l’hypothèse selon laquelle ce peintre serait l’auteur d’une série de rondels retraçant l’histoire vétérotestamentaire de la création du monde (Id. 1997, p. 54-62).
Comme l’a suggéré en 2008 Tiedemann, le rondel du Vitrocentre Romont peut en effet être aisément confronté aux deux rondels de cette même série, où l’on retrouve la figure de Dieu le père, portant les mêmes vêtements, une distribution du paysage semblable ainsi que certains détails, à l’instar des angelots dans le ciel (ibid.). La datation proposée autour de 1523, à l’instar des deux séries datées, l’une dédiée à la vie du Christ et l’autre à celle de Moïse, est cependant moins évidente (ibid. ; Tiedemann 2008, p. 12).
Si le rondel du Vitrocentre Romont peut être confronté à des gravures signées de l’artiste, à l’instar du „Christ appelant les pêcheurs Simon-Pierre et André à le rejoindre“, daté de 1523, où l’on retrouve un profil, une posture ainsi qu’un geste semblables (Londres, British Museum, inv. E,1.270), le style, les formes et le drapé rappellent également des oeuvres légèrement plus tardives, aux formes plus amples et au style plus ronds, à l’instar d’un rondel signé relatant l’Histoire d’„Abraham et d’Isaac“, daté entre 1535 et 1540 (Amsterdam, Rijksmuseum, inv. BK-NM-3154) voire, signé et daté de 1542, le rondel représentant le „Jugement de Cambyse“ (Amsterdam, Rijksmuseum, inv. BK-14517) (cf. Husband, Konowitz, Ruyven-Zeman 1995, cat. 77-79). Par conséquent, une datation plus large, comprise entre 1523 et 1542, paraît plus prudente.
Il existe une variante voire une copie ancienne du rondel du Vitromusée, très endommagée et anciennement conservée dans la collection Liberna à Hilversum (NL), dont le lien avec l’exemplaire de Romont doit encore être établi (cf. Romont, Vitromusée Romont, documentation, inv. VMR 10011, consultée le 4 avril 2022).