Le vitrail se compose de trois parties.
En haut, trois anges sont présentés les mains jointes.
Au centre, Notre-Dame de Bourguillon se présente de face, debout sur des nuées. Elle porte un sceptre de sa main droite et une grande croix autour du cou, entouré d’une collerette. Elle est coiffée d’une couronne posée sur un long voile descendant jusqu’à ses pieds et tient dans son bras gauche l’Enfant, également couronné, qui fait un signe de bénédiction de sa main droite. De grandes ornementations florales ornent leurs vêtements.
Sous la main droite de la Vierge figurent deux armoiries avec le monogramme marial, alors que sous les mains du Christ se trouvent deux petits portraits féminins encadrés.
Sous Notre-Dame, la chapelle de Bourguillon est représentée, avec à l’extérieur quelques croix plantées en terre. L’enceinte est fermée par un petit muret.
En bas à gauche, un jeune homme agenouillé, s’appuyant sur une canne, est accueilli par un vieillard, debout à l’entrée d’une maison, les bras ouverts. A ses côtés, un chien debout sur ses pattes arrière fait la fête au jeune homme. A droite, un homme d’âge moyen regarde la scène. A l’arrière-plan, on devine la silhouette d’un personnage tuant le cochon pendu par les pieds pour le repas de fête, et en dessous un poulet à peine esquissé, courant.

Ce vitrail consacré à Notre-Dame de Bourguillon et à la Parabole du fils prodigue se situe dans la cinquième fenêtre de la nef à gauche depuis le choeur de l’église Notre-Dame de l’Assomption d’Attalens. Il est l’oeuvre, comme l’ensemble des verrières de la nef, de l’artiste fribourgeois Gaston Thévoz et de l’atelier A. Kirsch & Co et date de 1942.

Lorsque le curé d’Attalens, Jean Dumont, lance le projet de création de vitraux pour la nef, il souhaite continuer, après la pose du vitrail de Cingria dans le choeur en 1938, à mettre à l’honneur la Vierge à laquelle l’église est dédiée, et propose aussi de rendre hommage aux sanctuaires mariaux les plus connus (Lauper, 2001, p. 73). Dans une lettre qu’il adresse à Alfred Kirsch, il lui écrit qu’il souhaiterait que Thévoz illustre dans ces vitraux “quatre fêtes de la Vierge : l’Immaculée conception, la Nativité, l’Annonciation et la Purification ou la Visitation ainsi que quatre vocables de la Vierge (centres de pèlerinage) : Notre-Dame de Lourdes, Einsiedeln, Bourguillon et les Marches” (Dumont, 1942a). La majeure partie des thèmes centraux réalisés dans les vitraux sont définis dans ce courrier, à l’exception de Notre-Dame des Marches, remplacée par Notre-Dame d’Attalens. Par contre, les scènes inférieures ne sont pas encore mentionnées par Dumont.
Alfred Kirsch confirme par écrit au curé Dumont en février 1942 qu’il fera un don pour l’exécution des vitraux en souvenir de son père, “qui de son vivant, a toujours eu une grande sympathie pour la paroisse d’Attalens”. Il souligne que cette aide est destinée à compléter la somme nécessaire à l’exécution, mais qu’il sera limité à un maximum de 5’000 francs (Kirsch, 1942a). Nous comprenons que le curé n’a pas encore réussi à réunir la somme nécessaire pour commencer les travaux, aussi Kirsch propose ce don non seulement en hommage à Vinzenz Kirsch, décédé en 1938 quelques mois après avoir terminé la verrière du choeur de Cingria, mais aussi pour garantir la réalisation de ce cycle.
Mobilisé en 1939, Thévoz grade et devient caporal d’artillerie (Thévoz, 2012, p. 9). En février 1942, suite à l’approbation du conseil de paroisse d’Attalens pour la création des vitraux, il dépose une demande de dispense militaire (Thévoz, 1942), avec l’aide d’Alfred Kirsch (Kirsch, 1942b). Cette demande est motivée par la nécessité de travailler dans les plus brefs délais pour Attalens, devant rendre ses dessins préparatoires rapidement afin que la paroisse bénéficie de l’octroi du subside fédéral et cantonal (Dumont, 1942b). Les sources issues des archives paroissiales ne nous permettent pas de savoir si les délais extrêmement courts fixés au 30 avril 1942 (Dumont, 1942c) ont été respectés, mais nous savons que fin mars 1943 les vitraux ornent l’église (Monnard, 1943).

Les descendants de l’artiste ont établi un catalogue raisonné en ligne de l’oeuvre du peintre où sont aussi présentés les vitraux que Thévoz a réalisés et parfois des dessins préparatoires (maquettes et cartons) en possession des descendants ou en propriété privée (Thévoz, s.d.). Pour les vitraux d’Attalens, il existe quatre maquettes, mais aucune n’est consacrée à cette verrière.
Le dessin de la statue de Notre-Dame de Bourguillon est fidèle à la réalité, jusque dans les motifs des vêtements que la Vierge et le Christ portent et les ex-votos accrochés à leurs bras.

En 1942, Gaston Thévoz a déjà une certaine expérience dans le vitrail, sa première création pour la chapelle Notre-Dame-du-Bois à Villaraboud datant de 1936 (Lauper, 2012b, p. 190). Une année avant le cycle d’Attalens, il crée des verrières pour l’église Saint-Gorgon à Porsel (Lauper, 2012c, p. 180) et pour la chapelle Saint-Hubert à Prévondavaux (Lauper, 2012d, p. 281). Il utilise à Attalens une nouvelle fois une dominante jaune, comme il l’a fait pour les scènes narratives de Porsel et pour les verrières de la chapelle du home médicalisé de Siviriez en 1940 (Lauper, 2012e, p. 188). A Attalens, il imagine pour la partie médiane de la fenêtre des scènes narratives ou des grands personnages et leur associe en bas un épisode provenant de la vie de la Vierge et du Christ ou illustrant des paraboles. D’un point de vue compositionnel, Thévoz fait preuve d’imagination dans ses créations. Il trouve pour chacun de ses cycles des combinaisons inédites et arrive à définir des lignes directrices fortes pour mettre en valeur son dessin. A Attalens, il construit ses verrières en trois sections distinctes et sépare la scène du milieu avec celle du bas grâce à une inscription et l’ajout d’un motif en lien avec la Vierge illustrée au-dessus. Stylistiquement, Thévoz présente un dessin simple allant à l’essentiel, efficace, lisible et d’un grand dynamisme, ceci même pour les représentations de la Vierge qui présentent pourtant un certain hiératisme, qui sont vêtues de tissus aux chatoiements multiples. Aucune des scènes inférieures n’est statique, le mouvement des personnages semblant être au centre même des préoccupations de l’artiste.