Pied de lampe noir et rouge
Aucune
St-Prex No 176/16 (Sous le fond: étiquette commerciale jaune et rouge)
Pied de lampe noir et rouge
Aucune
St-Prex No 176/16 (Sous le fond: étiquette commerciale jaune et rouge)
Verre, émail
Verre incolore soufflé en moule, pied appliqué, meulé à la hauteur du col, revêtement émaillé noir et rouge; forme: sphérique
Ce modèle (176) fut créé à une période précoce de la Verrerie artistique (1930-1964). Les sources dont nous disposons sont des catalogues de la Verrerie de St-Prex, certains inédits, tels que les albums noirs munis de photographies de vases, vraisemblablement utilisés par les représentants de 1931 à 1935. Le modèle converti en pied de lampe porte le no 8 (D 18 ou 20 cm) ou 9/164 (D 15, 18, 20 ou 22 cm) (Verreries de St-Prex, 1931). Le no 176 est le dernier no d’inventaire du catalogue de vente imprimé en 1935 (Verreries de St-Prex, 1935, 1), mais il correspond mal à cette production semi-industrielle qui ne prévoit pas d’exceptions. Il figure ensuite dans un répertoire non publié, qui, basé sur les numéros d’inventaire des catalogues de 1935 à 1960, dresse la liste de tous les modèles de la production artistique (Verreries de St-Prex, 1964, D 10, 12, 14, 16 et 22 cm). La liste de prix de 1951 ne le propose plus (Verreries de St-Prex, 1951). D’après les sources, ce modèle a ainsi été élaboré dès 1931 et produit jusqu’en 1935 environ.
Dans la critique récente, Baumgartner l’évoque en relation avec la phase d’élaboration avant 1935 (Baumgartner, 2018, 70). En revanche, en 1933 déjà, le céramiste Paul Ami Bonifas consacre un article à la "verrerie" où les vases réalisés sous sa direction en 1931, dont les modèles 8 et 9 du catalogue de 1931, illustrent son propos (Bonifas, 1933, 16-17). Le rapport avec Bonifas mérite d’être mis en évidence. Dans la monographie qui lui est consacrée, il évoque ses souvenirs de l’année 1931, notamment son engagement auprès de la Verrerie de St-Prex : "En vue d’un Salon fédéral des Beaux-Arts et des arts appliqués qui allait se tenir à Genève en 1931, la Société anonyme de la Verrerie de St-Prex me demanda de dessiner les modèles qu’elle se proposait de présenter au jury et de présider à leur fabrication" (Exposition nationale d’art appliqué, 1931; Beaujon, 1961, 75; Lecoultre-Brejnik & Musée Ariana, 1997, 46 et Baumgartner, 2018, 69).
Ce lien direct avec le créateur du design est conservé grâce à certaines œuvres, obtenues lors de l’exposition. Il y a d’abord un lot de douze vases acquis par le musée industriel de Lausanne (Kulling, 2014, 48-53), lot aujourd’hui réparti entre le mudac et le Musée Historique de Lausanne, dont la première pièce est cataloguée dans l’inventaire des acquisitions avec la mention: "d’après Bonifas", puis la pièce choisie par le Musée Ariana à Genève. Trois des vases exposés, les modèles "carafe col long" ainsi que les modèles 138 et 164 figurent également dans un album photographique d’œuvres, réalisées et compilées par Bonifas en vue d’une rétrospective prévue pour 1963 au Musée Rath à Genève. Jointe à l’album, une liste commentée donne quelques précisions: "[C]es trois pièces, avec une trentaine d’autres, furent dessinées pour [la] Manufacture de St-Prex en 1931 et exposées au Salon Fédéral des Beaux-Arts à Genève en 1931". Nous pouvons donc attribuer cette "trentaine" à Bonifas (Walther, 2025, 36-41). En outre, une photographie du stand de la Verrerie de St-Prex au Comptoir suisse de 1931 permet d’apprécier la vaste gamme des modèles, dont celui qui a servi de base pour le pied-de-lampe, qui illustrent aussi le catalogue utilisé par les représentants (Greppin, 1931; Verreries de St-Prex, 1931).
À la recherche de correspondances formelles, notons que le catalogue d’exposition Bonifas, céramiste du purisme, présente plusieurs œuvres boules proches des vases de Saint-Prex, voir identiques à ceux-ci (Lecoultre-Brejnik & Musée Ariana, 1997, 110, no 36, 111, no 41 et 145, no 84).
Ce type de vase ou cruche est déjà connu à l’époque romaine et à la Renaissance. Au XXe siècle, les mouvements d’avant-garde le remettent à l’honneur et, dès les années 1920 et 1930, il est répandu en Europe et aux États-Unis. Par ailleurs, le céramiste puriste mentionne également la présence à Saint-Prex d’un verrier italien, formé à Murano, avec lequel il a collaboré en 1931 (Beaujon, 1961, 75).
Ainsi, notre recherche s’oriente vers l’art verrier italien et plus particulièrement vénitien. On s’aperçoit alors que le travail du jeune Carlo Scarpa révèle plusieurs variations sur le thème de la sphère : avec pied ou talon, avec un col plus ou moins long, incurvé ou cylindrique ou avec une simple lèvre retournée pour couronner la sphère (Barovier & Sonego, 2018, 202‑203 et 296: modèles 5680, 5932 et 5970) ; ce sont autant d’idées retenues dans les catalogues saint-preyards (Verreries de St-Prex, 1931 et 1935). Montrées entre autres à Paris, Leipzig et Amsterdam entre 1928 et 1931, les créations de Murano manifestent l’effervescence du modèle boule. Ainsi, le céramiste Bonifas marie les aspects du design puriste au savoir-faire verrier contemporain.
Sans le timbre doré des premières années ou d’autres particularités, rien ne suggère une production du vase présenté ici avant 1935. En revanche, le revêtement émaillé noir et rouge faisait déjà partie du catalogue en usage de 1931 à 1935. Pour garantir une production la plus efficace possible, les pièces sont d’abord émaillées en noir. Dans un second temps, la seconde couleur, le rouge ou le bleu, était appliquée de manière spontanée. Ainsi, bien que produite de manière semi-industrielle, chaque pièce est unique.
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Barovier, M., & Sonego, C. (2018). The M.V.M. Cappellin glassworks and the young Carlo Scarpa: 1925-1931 (First edition). Skira editore S.p.A.
Baumgartner, E. (2018). Glaspferde aus Saint-Prex – Eine Spurensuche. Zeitschrift für schweizerische Archäologie und Kunstgeschichte, 75(1), 69–82. https://doi.org/10.5169/SEALS-760375
Beaujon, E. (1961). L’art du potier Paul A. Bonifas. A la Baconnière.
Bonifas, P.-A. (1933). Verrerie. Œuvres: Architecture, art appliqué, beaux-arts, 6(2), 16–18.
Commission fédérale des arts appliqués (Éd.) (1931). Exposition nationale d’art appliqué : [Genève, Palais des expositions, du 30 août au 11 octobre 1931]. A. Kundig.
Greppin, E. (1931). Photo du stand de la Verrerie artistique de Saint-Prex au Comptoir suisse de 1931 à Lausanne [Photographie sur papier]. Archives de famille, Annie Landgraf, Liège, Belgique.
Kulling, C. (2014). Les collections du Musée industriel: catalogue. Musée historique de Lausanne.
Lecoultre-Brejnik, A.-B., & Castellino, M. (1997). Paul Bonifas : Céramiste du purisme. Musées d’art et d’histoire.
Verreries de St-Prex [1931-1935]. [Catalogue de vente non publié]. Saint-Prex, Suisse : Verrerie de Saint-Prex. (1931). Archives, Musée du Verrier.
Verreries de St-Prex : une nouvelle branche d’activité. (1935). Verreries de St-Prex S.A. (Éd.).
Verreries de St-Prex S.A. (1951). Liste de prix. Vases et services à orangeade. 1951 = Preisliste. Vasen und Orangeande-Service. 1951. Imprimerie Rod.
Verreries de St-Prex. [Répertoire non publié]. (1964). Verreries de St-Prex S.A. (Éd.). Musée du Verrier.
Walther, S. (Ed.). (2025). La Verrerie artistique de Saint-Prex. Innovations artistiques et techniques. De Gruyter.