Ce vitrail ainsi que six autres oeuvres, dont un carton, ont fait l’objet d’une donation au Musée Ariana de Genève en 2020 par le verrier et peintre verrier Martin Halter, représentant la troisième génération de l’atelier bernois Halter.
Cette oeuvre verrière figurant un chat, réalisée en 2003 par Martin Halter, allie une maîtrise des techniques traditionnelles de l’art verrier (peinture à la grisaille et au jaune d’argent, verre plaqué gravé à l’acide) à une vision moderne du vitrail. L’artiste est convaincu qu’il n’est pas nécessaire de s’éloigner des “caractéristiques identitaires originelles du vitrail” pour expérimenter des voies artistiques contemporaines (Halter, 2023). Tout au long de ses réflexions créatives, il réfléchit parallèlement aux solutions techniques pouvant servir idéalement son projet. Cet avancement conjoint entre technique et création est selon lui toujours bénéfique à son oeuvre. Unir l’art et l’artisanat de manière indivisible est sa devise (Halter, 2023).
Superposant deux vitraux sertis de plomb, il apporte à son oeuvre une tridimensionnalité, non seulement par l’épaisseur qu’il lui octroie, mais aussi en jouant avec la transparence des deux panneaux superposés. La tête du chat peinte à la grisaille et au jaune d’argent, de manière très détaillée et réaliste (presque photographique) sur la couche supérieure avec des yeux jaunes perçants, voit ceux-ci mis d’avantage en valeur grâce à leur contour gravé sur la strate inférieure. Le corps du chat, qui pourrait aussi être celui d’un tigre, est dessiné de manière très graphique sur la couche inférieure de l’oeuvre, mais contrairement à la tête, n’est pas peint à la grisaille et au jaune d’argent, mais esquissé à l’aide d’un travail de verre plaqué gravé à l’acide faisant apparaître deux nuances de teintes de rouge et un verre transparent. Ce corps est confronté sur la strate supérieure à des bandes verticales de deux nuances de rouge et d’un verre transparent, couches travaillées elles aussi à l’acide. Cette superposition des strates et leur interactivité apporte un dialogue inédit entre figuration et géométrie qui mène l’oeuvre sur des sentiers résolument modernes.
De plus, comme le souligne Halter, cette technique superposant deux vitraux a l’avantage de permettre des restaurations ou réparations plus aisées puisque les deux couches sont indépendantes et démontables (Halter, 2023).
L’artiste débute ses recherches sur la tridimentionnalité en 1983-1984 en même temps que ses vitraux unidimentionnels, qu’il appelle “libres” , faisant “sauter” les cadres. Sa “Migration des oiseaux” (”Vogelzug”*) (VMR_940), donation faite au Vitromusée Romont en 2020, allie ces deux regards, l’oeuvre tridimentionnelle n’étant plus enfermée dans un cadre rectangulaire stricte.
Pour “Katze auf dem Radar”, comme d’ailleurs pour toutes ses oeuvres, l’artiste donne un intitulé à sa création seulement lorsque celle-ci est terminée. Parfois, le titre se limite à ce que l'œuvre tente de transmettre, complétant et arrondissant le message visuel. Parfois aussi, la désignation d’un titre permet de déclencher chez le spectateur une association souhaitée par l’artiste (Halter, 2023). C’est la volonté clairement exprimée par l’artiste avec ce titre : “Katze auf dem Radar”* menant le spectateur à considérer conjointement l’apparence réaliste de la tête du chat avec son corps plus graphique, comme si celui-ci avait été passé au scanner.