Ce vitrail quadrilobé représente le martyre de Sébastien, saint patron des tireurs. Il pourrait avoir été commandé par une “Confrérie de saint Sébastien”, société de tir à l’arc et à l’arbalète, comme il en existait de nombreuses au XVe siècle (Lapaire, 1980, p. 30). Il était peut-être destiné à orner les baies du siège de cette confrérie non identifiée.
Le peintre verrier n’est pas connu. Le format, la composition et le style d’exécution du vitrail l’inscrivent dans la production allemande ou suisse de la fin du XVe siècle. Selon Lapaire (1980, p. 30), il pourrait avoir été exécuté dans un atelier actif en Rhénanie, le long du Rhin, entre Bâle et Mayence. Le traitement minutieux et léger de la grisaille a été rapproché des productions du maître anonyme dit “Hausbuchmeister” (Lapaire, 1980, p. 30), actif en tant que peintre, dessinateur et graveur durant la fin du XVe siècle dans le sud de l’Allemagne (cf Hutchison, 1972). Ces travaux étaient très appréciés et semblent avoir largement circulé, notamment dans les ateliers de peintres verriers de la région rhénane qui pouvaient s’en inspirer afin de composer leurs médaillons quadrilobés (Becksmann, 1968, p. 359). Parmi les créations inspirées du style du maître qui se rapprochent du présent vitrail se trouve une copie d’un carton daté vers 1480 pour une verrière de même format, figurant des scènes profanes avec un couple d’amoureux (Becker, 1912, p. 219-222 ; Schmitz, 1913, p. 103 ; Rathe, 1934, p. 68).
Un autre vitrail possédant des similitudes du point de vue du format, de la composition et de l’iconographie de l’un des lobes est cité par Schmitz (1913, p. 108-109, fig. 183 a) et Lehmann (1913, p. 214, fig. 4). Conservé au Musée national de Zurich, il représente au centre les armoiries de la famille bernoise Dittlinger, encadrées dans les lobes d’un archer, d’un lion, d’un chevalier armé d’une lance et d’un bouclier, ainsi que d’un combat avec un dragon. Au vu des écoinçons ornés de motifs végétaux qui encadrent ce quadrilobe afin d’en faire un médaillon, il est probable que le présent vitrail ait à l’origine également été paré de tels ornements, avant d’être remplacés, lors d’une restauration, par les actuels verres blancs et jaunes disposés de manière géométrique.
Le Schlossmuseum de Thoune possède également un médaillon quadrilobé similaire, daté vers 1470 (BE_1246). Probablement réalisé dans un atelier bernois, il représente en son centre l’écu armorié de la famille Käsli de Thoune, encadré de scènes galantes avec un couple d’amoureux, peintes à la grisaille et au jaune d’argent. Des similitudes avec les dessins du Hausbuchmeister ont également été relevées par Schmitz (1913, p. 108-109) sur ce panneau.
Pour figurer saint Sébastien, le peintre verrier semble avoir pris pour modèle une gravure de Martin Schongauer datant du XVe siècle (BNF ; ark:/12148/btv1b69515112). La posture du saint et son environnement y sont repris de manière similaire, exception faite des flèches qui ne transpercent pas encore le corps du martyr ou de l’expression de son visage. L’archer et l’arbalétrier, disposés de part et d’autre du saint, pourraient quant à eux avoir été plus largement inspirés par les tireurs représentés sur une gravure du martyre de saint Sébastien, réalisée vers 1475-1480 par le “Hausbuchmeister”, aujourd’hui conservée au Rijksmuseum à Amsterdam (RP-P-OB-904 ; http://hdl.handle.net/10934/RM0001.COLLECT.34128).
Le vitrail a été acheté par un artiste peintre à Grengiols, en Valais, avant d’être revendu en 1887 (Lapaire, 1980, p. 30).
Cité dans :
Rathe, 1934, p. 68-71.
Witzleben, 1977, p. 128-129, ill. 148 ; remarque : “Hausbuchmeister-Werkstatt”
Lapaire, 1980, p. 30-31, pl. 15.