Une première chapelle est construite au lieu dit "Les Marches", à Broc, probablement en 1560-1570. Il s'agit de l'une premières chapelles de dévotion en Gruyères, préfigurant une importante série de constructions de nouvelles chapelles de dévotion, principalement dédiées au culte marial, durant le XVIIème siècle dans la paroisse de Charmey (Rime, 2005, p. 29-31). En 1636, un cimetière pour pestiférés est installé à proximité de la chapelle, qui servait alors à célébrer les enterrements afin d'éloigner les contaminés de l'église. Dès 1656, la messe peut y être célébrée, et en 1678 un premier ex-voto est placé dans le sanctuaire (Rime, 2005, p. 34-35).
Au début du XVIIIème siècle, le prieur de Broc, Dom Nicolas Ruffieux, a l'ambition de construire une nouvelle église au centre du village de Broc (elle ne sera édifiée qu'en 1877). Ce projet ne pouvant aboutir, le prieur se rabat sur la chapelle des Marches, dont il décide qu'elle sera "la plus belle du pays". Son frère, Jean-Jacques Ruffieux, curé de Gruyères et prêtre bâtisseur, fait construire en 1701 la chapelle Notre-Dame de Compassion à la Daudaz, qui a probablement servi de modèle pour les Marches, dont le gros-oeuvre est achevé vers 1705 (Rime, 2005, p. 39-46). Le sanctuaire acquiert une véritable renommée à la fin du XIXème siècle, suite à la guérison miraculeuse de la jeune Léonide Andrey, le 17 mai 1884. A la suite de ce miracle, le lieu de culte devient un pèlerinage cantonal et diocésain de premier ordre, tandis que d'autres guérisons y sont relatées (Rime, 2005, p. 60, 64-65).
Dès 1925, des aménagements sont effectués à l'intérieur et à l'extérieur de la chapelle. Une table sainte est notamment ajoutée dans le choeur, qui sera réutilisée pour devenir le nouvel autel face au peuple suite au Concile de Vatican II. A la fin des années 1920, la nécessité d'une rénovation se fait de plus en plus sentir et la paroisse entre en contact avec Fernand Dumas, architecte phare du Groupe de Saint-Luc, en 1929. Ce dernier se chargeant déjà de la rénovation de l'église paroissiale, c'est à lui que sera confié ce mandat (Rime, 2005, p. 86-87). Entre 1931 et 1932, sous la direction de Dumas, la toiture est refaite, un crépi blanc est apposé sur les murs et les dorures de l’autel sont ravivées. La statue de la Vierge reçoit également un nouveau manteau avec des broderies de laine, réalisé par l’artiste du Groupe de Saint-Luc, Marguerite Naville (Protocole de la séance du Conseil paroissial, 1931 ; Rime, 2005, p. 119-120). Deux anciens vitraux représentant le Sacré-Coeur et la Vierge, probablement placés dans les fenêtres surplombant les confessionnaux dans le choeur, sont alors remplacés par de simples “grisailles”, probablement produites par l'atelier Chiara (Protocole de la séance du Conseil paroissial, 1932 ; Atelier Vve Pierre Chiara, 1932).
En 1943, une nouvelle rénovation intérieure est à l’étude par Dumas, qui se déploie entre 1944 et 1945. La chapelle est repeinte, de nouveaux confessionnaux et bancs sont créés, et l'autel et le retable sont colorés de surpeints rouges et verts afin de s'harmoniser avec la polychromie intérieure. L'orfèvre Marcel Feuillat réalise également plusieurs pièces d'orfèvrerie qui figurent parmi ses oeuvres majeures. (Rime, 2005, p. 89, 112, 118). Deux fenêtres sont percées dans le choeur, jouxtant l’autel, qui seront garnies de vitraux réalisés par Cingria et l'atelier Herbert Fleckner à Fribourg (Protocole de l’assemblée paroissiale, 1944). L'artiste réalise également les cartons des deux verrières de la nef, remplaçant des vitraux anciens sur le même thème. Sa santé déclinante puis son décès en novembre 1945 l'empêchent de venir à bout du projet qui sera terminé par son gendre, l'artiste Emilio-Maria Beretta, qui réalise également les vitraux des deux fenêtres nord et sud du choeur en collaboration avec Fleckner (Rime, 2005, p. 116-117). La pose de ces derniers vitraux et d’un chemin de croix en peinture sous-verre de Gaston Faravel mettent un point final à cette rénovation, qui constitue une nouvelle intervention importante des artistes du Groupe de Saint-Luc dans le canton de Fribourg.
En 1990, une restauration de la chapelle est entreprise afin de blanchir les murs noircis par la fumée des lumignons et pour paver la place attenante. L'autel et le retable sont également restaurés, en respectant la polychromie établie par les artistes du Groupe de Saint-Luc en 1944-1945. De nouveaux travaux sont effectués entre 2005 et 2006, portant notamment sur le changement du chauffage et des installations électriques. Des fouilles archéologiques sont menées parallèlement, tandis que les peintures des parois et voûtes sont refaites et les bancs restaurés (Francey, 2006).
Atelier Vve Pierre Chiara. (1932, 10 juin). Facture adressée à l’abbé Seydoux. Archives de la paroisse de Broc, Suisse. Francey J.-M. (2006, 19 décembre). Résumé des travaux effectués par la Direction des travaux. Archives de la paroisse de Broc, Suisse.
Protocole de la séance du Conseil paroissial. (1931, 22 décembre). Dans cahier : Conseil paroissial de Broc, Procès-verbal 19 juillet 1929-2 octobre 1935. Archives de la paroisse de Broc, Suisse.
Protocole de l’assemblée paroissiale. (1944, 3 mai). Dans cahier : Protocoles des assemblées paroissiales de Broc 1924-1970. Archives de la paroisse de Broc, Suisse.
Rime, F., Rime, J. (2005). Les Marches : Le petit Lourdes fribourgeois / Histoire d’un lieu sacré. Bulle, Suisse : Editions gruériennes.